Les avions de combats américains bombardent sans relâche Istanbul et Ankara, tuant des centaines de personnes, et la Turquie entière est en feu et en flammes : l’opération « Tempête de métal » est engagée contre l’ex-allié turc.
Le livre de deux jeunes turcs, qui relate avec un maximum de détails une hypothétique guerre entre Turcs et Américains, a déjà été vendu à plus de 100.000 exemplaires depuis sa parution en décembre dans un pays où les ventes de livres se limitent généralement à quelques milliers.
Le roman a surtout le vent en poupe en raison des vifs sentiments anti-américains en Turquie depuis l’occupation de l’Irak en 2003 qui a provoqué des tensions réelles entre deux alliés de l’Otan.
L’histoire se déroule en mai 2007. Des troupes turques déployées dans le nord de l’Irak pour y protéger les droits de la minorité turcomane, de souche turque, sont attaquées par les forces américaines.
Une vaste campagne de désinformation est lancée sur les médias américains qui font état d’une offensive turque contre les GIs.
L’objectif inavoué de l’opération est de s’emparer des vastes gisements de bore en Turquie, pays qui détient plus de 60% du stock mondial, pour l’utiliser à des fins énergétiques.
Les principales villes turques sont pilonnées par l’aviation américaine qui inflige de lourdes pertes en vies humaines. La Turquie, surprise, se tourne vers l’Union européenne et la Russie pour de l’aide.
Le succès de l’ouvrage, selon les critiques qui lui trouvent peu de valeur littéraire, s’explique par les tensions qui marquent les relations turco-américaines.
Les liens d’Ankara avec Washington, qui remontent aux années d’après guerre, ont été très éprouvés par le refus du parlement turc, dominé par le parti (au pouvoir) de la Justice et du Développement (AKP, issu de la mouvance islamiste) d’ouvrir un front nord pour les Américains contre l’Irak.
Depuis, malgré des déclarations officielles insistant sur le caractère « stratégique » de ces relations, le froid est évident entre les deux capitales.
Douglas Feith, le sous-secrétaire américain à la Défense et considéré comme l’un des faucons de l’administration Bush, a récemment indiqué dans des propos rapportés par la presse turque que le partenariat turco-américain ne survivrait pas si le gouvernement turc n’intervenait pas pour atténuer l’anti-américanisme dans ce pays à population musulmane.
Selon la presse turque, « Tempête de métal » a un lectorat parmi la classe politique, notamment à l’AKP, où l’hostilité américaine est allé jusqu’à qualifier de « génocide » l’offensive américaine en Irak, mais aussi chez les militaires.
Ses auteurs, Orkun Ucar, un accro de la science-fiction, et Burak Turna, ancien journaliste expert en questions de défense, affirment que leur scénario est plausible et ne cachent par leur opposition aux politiques de la superpuissance américaine.
« Ce roman n’évoque pas un complot politique mais une théorie de possibilité », estime Burak Turna.
« Les Etats-Unis agissent aujourd’hui avec une mentalité qui remonte à la croisade », souligne de son côté Orkun Uçar. « Comme les armées croisées qui s’étaient emparés de Jérusalem il y a des siècles, les Américains font la même chose de nos jours », dit-il dans une interview à un hebdomadaire spécialisé.
Fiction ou pas, l’anti-américanisme fait vendre.
La maison d’édition Timas vient de publier 50.000 nouveaux exemplaires du livre, précise une responsable, Yasemin Nak. Elle explique cet intérêt par le fait que le roman s’adresse « au subconscient des lecteurs turcs ».