Contexte : L’historien, journaliste et producteur de l’émission « Chrétiens d’Orient » sur France Culture, Sébastien de Courtois est correspondant de presse spécialisé sur la Turquie, le Proche-Orient et les minorités chrétiennes. Il vient de publier aux éditions Stock un essai : « Sur les fleuves de Babylone, nous pleurions » dans lequel il évoque la tragédie de l’été 2014 touchant les minorités religieuses, chrétiennes et yézidis, de la Syrie à l’Irak en passant par le Liban et la Turquie.
Invité de (...)
La Syrie n’est, certes, pas le sujet de ce site, mais les peuples du Moyen Orient sont tellement imbriqués et ses frontières si artificielles qu’il nous semble intéressant de publier cet extrait. Voir les communautés syriennes au travers du regard d’un enfant éclaire sur la vision qu’il peut avoir des autres communautés quand il est éduqué dans une famille musulmane, et donc sur la perception qu’avaient les musulmans des autres groupes ethno-religieux avec lesquels ils vivaient, avant que la politique (...)
À peine modifié, le titre s’inspire de la Bible « Au bord des fleuves de Babylone, nous nous étions assis et nous pleurions en pensant à Sion. », Psaume 137 (136 selon la Vulgate catholique et la numérotation grecque). Le sous-titre est une métaphore associant le crépuscule d’un jour à la mort imminente d’une communauté d’hommes et de femmes, en l’occurrence, celle des chrétiens d’Orient. Le rouge du soleil mourant de la couverture est le sang répandu des victimes qui n’aspiraient qu’à vivre en paix avec les (...)
Symbole. A la frontière syrienne, elle a fait alliance avec les Kurdes. Portrait d’une héroïne.
De notre envoyé spécial à Mardin (Turquie), Sébastien de Courtois
C’est d’un pas pressé que la jeune femme pénètre dans son bureau. Élancée, les cheveux découverts, elle porte une petite croix autour du cou. Il est 9 heures du matin. La mairie de Mardin bourdonne déjà comme une ruche. Ce sont des employés, des quémandeurs, une famille de réfugiés irakiens qui attend sagement son tour devant le bureau d’aide (...)
Il y a quelques jours a eu lieu le cinquante-huitième anniversaire du pogrom d’Istanbul ou événements du 6-7 septembre 1955. Ces émeutes qui ciblaient les minorités chrétiennes et juives d’Istanbul, les Grecs en premier lieu, ont été encouragées par le Parti Démocrate au pouvoir depuis cinq ans et engagé dans une spirale autoritaire, populaire et xénophobe qui se terminera avec le coup d’Etat de 1960 et l’exécution du premier-ministre en exercice depuis dix ans, Adnan Menderes. Dans un contexte de tension (...)
Un professeur de l’Université Akdeniz d’Antalya, Nevzat Çevik, vient d’appeler le Vatican à rapatrier en Turquie les reliques de Saint-Nicolas, l’évêque de Myra, qui est à l’origine de la légende du Père Noël. Ce si célèbre personnage est, en effet, né au IVe siècle, à Patara, dans l’ancienne Lycie. Il a vécu l’essentiel de sa vie dans le port voisin de Myra, où il est mort le 6 décembre 343. Devenu aujourd’hui Demre, une bourgade d’une quinzaine de milliers d’habitants de la province d’Antalya, en Turquie, le (...)
Mon premier voyage en Turquie orientale remonte au printemps 1998. Je voyageais alors avec un ami autour du lac de Van. Sur le chemin du retour, une erreur de dolmus me conduisit dans la petite ville de Midyat, au lieu de Diyarbékir, où nous devions prendre un avion vers Istanbul. De là, je découvrais par hasard les monastères et villages syriaques de cette région appelée Tur Abdin, « La montagne des serviteurs de Dieu » en syriaque. Ma passion pour cette partie du monde, la Turquie d’abord et son (...)
Depuis 2005, une trentaine de familles d’origine syriaque sont revenues vivre dans le Sud-Est de la Turquie, dans la région de Tur Abdin. Ce reportage a été originellement commandé par le quotidien Milliyet, paru les 14 et 15 mai. Il témoigne aussi de l’intérêt grandissant de la presse turque pour le sujet des Süryaniler (nom donné en turc aux chrétiens de culture syriaque). Au moment où les chrétiens quittent d’autres parties du Proche-Orient, cet exemple permet de montrer la Turquie sous un meilleur (...)
Lors du génocide de 1915, des dizaines de milliers d’Arméniens, femmes et enfants, ont été kidnappés, convertis et mariés de force. De nombreux Turcs découvrent aujourd’hui que l’une de leur aïeule était arménienne.
Un secret d’État, l’existence de ces « Arméniens cachés ». L’évoquer, c’est ébranler le mythe national de « l’identité turque et musulmane », fondement de la République turque. La première fois que j’ai entendu parler de « crypto-arméniens », je n’y ai d’ailleurs pas vraiment cru.
C’était au début des (...)
“En 1907, Diyarbakir était la troisième ville d’Anatolie en ce qui concerne le textile, le secteur principal de l’economie. Aujourd’hui, elle est en 66e position. Les Arméniens et les Syriaques ont été exterminés, il s’en est suivi un exode des cerveaux et du capital. Ils sont partis et la paix n’est plus jamais revenue sur ces terres. Nous nous sommes appauvris. Nous n’avons connu de stabilité, ni économique, ni politique depuis. Nous avons été maudits parce qu’il avait été porté atteinte à une valeur (...)