Sur la place Taksim d’Istanbul, les manifestations se succèdent depuis plusieurs semaines, décuplées par les violentes répressions des forces de l’ordre et l’autoritarisme du Premier ministre Erdogan. Un mouvement sans précédent en Turquie, parfois comparé à celui de mai 68, aux Indignés d’Occupy ou aux printemps arabes. Que signifie ce soulèvement d’une partie de la jeunesse ? Quel sera l’impact de cette contestation sur la société turque ? Retour sur un siècle d’histoire, pour comprendre les racines de (...)
En 1996, le parti islamiste Refah marque son arrivée au pouvoir par l’annonce de la construction d’une mosquée sur la place de Taksim. C’est un processus d’islamisation de l’espace. Erbakan et Erdogan veulent « parachever la conquête d’Istanbul », réalisée en 1453 et par les élections municipales de 1994. Puis, c’est le tour d’une chapelle médiévale de la citadelle de Bodrum. Les deux projets avortent, mais aujourd’hui la même menace se réalise à Sainte-Sophie de Trabzon... A quand le tour de Sainte-Sophie (...)
Il est fréquent en Turquie d’accuser son adversaire politique d’être soutenu de façon inconditionnelle par les États-Unis. Les révélations apportées dans les câbles publiés par Wikileaks montrent qu’il s’agit plus, de la part des américains, d’une attitude pragmatique qui leur permet de garder un allié stratégique précieux. Erdoğan et son gouvernement sont loin d’être considérés comme des « modéles » et il ne sont ni plus ni moins soutenus inconditionnellement par l’Oncle Sam que leurs prédécesseurs, il ne (...)
De retour de Turquie, une auteure franco-turque témoigne : Je rentre d’Istanbul. Si je n’y étais pas allée, je n’aurais pas compris. Je n’aurais pas ressenti « l’esprit de Gezi » si je ne l’avais pas vu de mes propres yeux, en dépit des milliers de photos et de vidéos que j’épie obsessionnellement sur Facebook et Twitter depuis le 30 mai.
Ce parc abrite des milliers « d’habitants » depuis quinze jours. On y trouve bien évidemment des tentes, mais aussi une infirmerie, une longue table où des volontaires (...)
Dix jours après le début des premières manifestations contre le gouvernement turco-islamiste, incarné par le premier ministre Recep Tayyip Erdoğan, la répression étatique vient de franchir un seuil. Le but est on ne peut plus clair. Semer la terreur, faire taire les citoyens, annihiler toute forme de résistance à l’islamisation fascisante de la société, intimider les démocrates par tous les moyens, les priver de leurs droits fondamentaux, mais aussi faire planer dans toutes les villes du pays la menace (...)
Monsieur le premier ministre, c’est la deuxième fois que je vous adresse une lettre ouverte. Dans ma première lettre, à laquelle vous n’avez pas répondu, j’évoquais non pas le procès intenté à mon roman Les Filles d’Allah, accusé de blasphème, car la justice doit être indépendante dans une démocratie, mais le rapport que la direction des affaires religieuses, qui dépend de vous, avait rédigé pour me faire condamner à une peine de prison. J’ai été acquitté au bout d’un an de procédure judiciaire mais le (...)
À l’image de la « fille en rouge » gazée par la police, des manifestantes descendent dans la rue pour défendre leurs droits.
Le visage de la révolte est féminin. C’est celui de « la fille en rouge ». Une jeune femme habillée d’une robe rouge fait face à une rangée de policiers casqués des pieds à la tête. L’un d’eux l’asperge de gaz lacrymogène. Ses cheveux se soulèvent. Le cliché a fait le tour du monde. Bien malgré elle, Ceyda Sungur est devenue l’icône du parc de Gezi et le symbole de la répression policière (...)
Recep Tayyip Erdoğan a-t-il jamais réellement voulu que la Turquie intègre l’Union européenne ? Ou bien a-t-il toujours eu en tête le dessein de rendre à la Turquie l’influence ottomane qu’elle avait perdue, de l’ancrer plus à l’est à qu’à l’ouest ?
L’autre nuit, regardant et écoutant le Premier ministre turc tout juste descendu de l’avion qui le ramenait du Maghreb, alors qu’il haranguait les quelques milliers de ses partisans venus l’accueillir à l’aéroport, je me suis souvenue de lui –mais était-ce bien le (...)
Pour Zihni Özdil, doctorant à l’université Erasmus de Rotterdam, loin de représenter une menace pour le gouvernement, les manifestations de Gezi Parki seraient le chant du cygne, le dernier soubresaut de la classe moyenne et supérieure, laïque et kémaliste, qui a définitivement perdu tous les leviers du pouvoir en Turquie. Seule une possible crise économique pourrait détourner la base conservatrice de la société turque de « son » Premier Ministre.
Dès leur commencement, les projets du gouvernement turc (...)
Les images des manifestations de ces derniers jours à Istanbul et ailleurs en Turquie et leur répression disproportionnée par la police turque ont fait le tour du monde et surpris bon nombre d’observateurs. Mais comment en est-on arrivé là ?
Le Gezi Parki, dernier rempart d’une ville défigurée
Tout a commencé par un rassemblement pacifique débuté il y a plusieurs semaines sur la place de Taksim. Dans une ville étouffée sous le poids de la construction de logements et de centres commerciaux (voir le (...)