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Turquie et Croatie obtiennent leur sésame pour l’UE

lundi 3 octobre 2005

L’express avec Reuters

La Turquie et la Croatie ont obtenu leur sésame pour entamer des négociations d’adhésion à l’Union européenne après des tractations difficiles qui laissent augurer de pourparlers très durs avec Ankara.

Les ministres des Affaires étrangères des Vingt-Cinq sont parvenus à un accord entre eux, puis avec les Turcs, après avoir surmonté les réticences de l’Autriche, qui souhaitait proposer une alternative à l’intégration pure et simple de la Turquie.
« Cette décision historique de l’Union européenne va avoir des répercussions dans tout le monde islamique », s’est réjoui le ministre portugais des Affaires étrangères, Diogo Freitas do Amaral. « Probablement, cela déplaira à monsieur ben Laden qui a tout fait pour éviter que ce moment arrive. »
Le ministre turc des Affaires étrangères, Abdullah Gül, a abondé dans le même sens à l’aéroport d’Ankara, avant de se rendre au Luxembourg pour la cérémonie d’ouverture des négociations, après que l’UE eut entériné l’accord.
« Un point historique est atteint aujourd’hui avec le début de nos pourparlers d’adhésion. La Turquie est engagée dans une ère nouvelle », a-t-il déclaré aux journalistes.
Jack Straw, le chef de la diplomatie britannique dont le pays préside actuellement l’UE, s’est lui aussi félicité d’avoir atteint un des objectifs majeurs de Londres.
« C’est vraiment un jour historique pour l’Europe et pour toute la communauté internationale », a-t-il dit en estimant que « tous les élargissements avaient rendu l’UE plus forte ».
Le chef de la diplomatie française, Philippe Douste-Blazy, s’est dit satisfait d’ancrer un pays musulman à la démocratie plutôt que de le précipiter dans les bras de « l’intégrisme ».
Mais la France, a-t-il dit, estime que, s’il y a nécessité politique d’élargir l’UE, il y a aussi l’impératif de son approfondissement, qui ne peut se faire, du moins au départ, que grâce à des « groupes pionniers » plus étroits.
Après une nuit et une journée d’un intense ballet diplomatique qui a même vu la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice intervenir par téléphone, Vienne et Ankara ont accepté un texte qui maintient l’objectif de l’adhésion.
Les enjeux étaient élevés : il s’agissait surtout de ne pas ajouter une nouvelle crise à la crise constitutionnelle et budgétaire que l’Union vit actuellement après le double « non » français et néerlandais à la Constitution européenne.
Même si l’Autriche a toujours démenti tout lien entre la Turquie et la Croatie, ce n’est qu’après avoir obtenu l’assurance que les négociations d’adhésion commenceraient aussi avec son poulain croate que Vienne a vraiment lâché du lest.
ÂPRES NÉGOCIATIONS
Carla del Ponte, procureur du Tribunal pénal international sur l’ex-Yougoslavie (TPIY), est en effet venue donner à Luxembourg son feu vert implicite à l’ouverture prochaine de ces pourparlers en estimant que Zagreb coopérait désormais « pleinement » avec son institution, le signal attendu.
Les négociations ont été d’une grande âpreté.
Les chefs de la diplomatie européenne se sont retrouvés dès dimanche dans une véritable course contre la montre pour adopter le mandat de négociation avec la Turquie à temps pour permettre à Gül de prendre son avion à destination du Luxembourg.
Mais les projets de mandat ont été rejetés les uns après les autres par l’Autriche, par la Turquie ou par Chypre.
L’Autriche a longtemps fait de la résistance en réclamant que figure dans le mandat une solution de rechange à l’adhésion pour tenir compte d’une opinion publique opposée à 80% à l’adhésion du pays musulman qu’est la Turquie.
A un moment, Jack Straw, a paru près de céder au désespoir.
« Oui, nous sommes proches (d’un accord) mais nous sommes aussi au bord du précipice », a-t-il dit en mettant en garde contre un échec « catastrophique pour l’Union européenne ».
Même si certains pays, comme la France, ont eux aussi évoqué l’idée d’un « partenariat privilégié » comme formule alternative à l’adhésion en cas d’échec des négociations, ils savaient que la Turquie refuserait de les entamer si l’objectif était affiché.
OBJECTIF ADHÉSION
Mais les 24 partenaires européens de l’Autriche n’ont pas voulu s’écarter du texte accepté en décembre 2004 - y compris par le chancelier Wolfgang Schüssel - sur le cadre de ces négociations, sauf en y ajoutant quelques détails.
« L’objectif commun des négociations est l’adhésion », peut-on y lire. « Ces négociations sont un processus ouvert dont l’issue ne peut pas être garantie à l’avance » et, en cas d’échec, la Turquie devra être « pleinement ancrée dans les structures européennes par le lien le plus fort possible », ajoute le document qui évoque la « capacité d’absorption » de l’UE.
Vienne a obtenu des précisions qui ne changent pas l’essentiel, notamment des précisions sur cette capacité.
Un autre problème est apparu lorsque la Turquie a fait savoir qu’elle voulait modifier un article du mandat de négociation stipulant que les Etats membres de l’UE peuvent adhérer à n’importe quelle organisation internationale.
La Turquie ne voulait pas de ce passage, qui permettrait à Chypre d’adhérer à l’Otan, alors que Nicosie exigeait son maintien : le problème a été résolu grâce à une déclaration de la présidence rassurant la Turquie en matière de défense.
Ankara a fait durer le suspense en retardant son accord final, mais l’avion de Gül a fini par décoller de l’aéroport.
La difficulté de ces pourparlers laisse présager une négociation délicate pour achever des pourparlers d’adhésion avec un pays qui serait le plus peuplé de l’UE et absorberait entre 16 et 28 milliards d’euros de fonds européens par an en 2025, somme énorme qui en fait réfléchir plus d’un.

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