L�économie turque présente beaucoup de caractéristiques d�une économie dynamique et stable, bien intégrée dans l�économie régionale et mondiale.
L�étude de l�évolution de ses structures productives depuis le début des années 1990 fait apparaître un lent déclin du secteur agricole, au profit d�autres activités plus performantes. Toutefois l�agriculture emploie encore 35% de la population active et contribue pour 14% au PIB. Cet écart traduit la faible productivité des nombreuses exploitations agricoles et fait craindre une accélération de l�exode rural. Il faut toutefois signaler que c�est sa diversité qui a permis d�asseoir, au début des années 1990, une industrie agroalimentaire performante qui exporte aussi bien vers le Moyen-Orient que vers l�Europe.
Les deux principaux atouts de l�économie turque sont l�industrie manufacturière et le secteur du commerce, de l�hôtellerie et de la restauration.
Le secteur manufacturier � et notamment celui du textile, qui est le principal employeur du pays � est le plus gros exportateur net de marchandises avec 11,3 milliards de dollars. L�industrie de l�habillement turque s�est hissée au cinquième rang mondial et elle est l�une des mieux préparées pour résister à la concurrence chinoise, notamment après la fin, le 31 décembre 2004, de l�Accord textile-vêtements qui remplaçait l�Accord multifibres de 1973. Le secteur automobile occupe la deuxième place dans les exportations de marchandises depuis 2000, place occupée jusqu’alors par le secteur agroalimentaire. Viennent ensuite les exportations de produits chimiques (9% en 2003), puis les exportations sidérurgiques (8,5%).
Le tourisme est une activité dynamique qui s�appuie sur un potentiel balnéaire et touristique considérable. Il a représenté, avec 14 millions de touristes étrangers en 2003, la première source de revenu du pays avec 13,4 milliards de dollars. Les secteurs des transports, des services et des télécommunications contribuent également à la croissance de l�économie, de même que le secteur des constructions dont les entreprises sont bien implantées en Asie et au Moyen-Orient.
En ce qui concerne les investissements directs étrangers, leur niveau est relativement faible � un milliard de dollars soit 0,5% du PIB � alors que les deux tiers de l�investissement brut sont privés. Ces données reflètent l�importance du « capitalisme national » très vigoureux en Turquie, qui a favorisé la propriété familiale des grands groupes au détriment de multinationales.
Handicaps
Les performances du secteur productif turc et sa résistance à trois crises financières majeures (1980, 1994, 2001) ne doivent pas masquer de nombreux handicaps.
En premier lieu, l�économie turque laisse apparaître des contrastes saisissants, puisque ces performances ont été réalisées dans un contexte macroéconomique souvent défavorable, avec un endettement public qui représente 60% du PIB, une inflation qui a atteint des pics de 80% à 100% et une croissance irrégulière.
Le second handicap a trait à la répartition géographique très inégale des richesses. Les PME, qui représentent 65% de l�activité économique, sont concentrées à plus de 50% à Marmara et en Anatolie, contre 10% à l�Est et au Sud-Est. Ce phénomène crée des disparités importantes dans le développement de ces régions et vient se superposer aux inégalités sociales. La Turquie est l�un des pays où le fossé entre les couches favorisées des grandes villes de l�Ouest et les habitants des villages du Sud est le plus important.
Ainsi, si Istanbul se situe au niveau de la richesse moyenne de l�Union européenne, le revenu moyen dans les régions du Sud-Est descend à 500 dollars par an et par habitant avec un chômage qui frappe 50% de la population active.
Il faut enfin noter l�existence d�une économie souterraine qui représente près de la moitié du PIB et concerne 40% des forces de travail. Le secteur informel est composé de plusieurs dizaines de milliers d�entreprises qui sont souvent des sous-traitants d�entreprises établies.
L�ouverture prochaine des négociations d�adhésion à l�Union européenne, prévues le 3 octobre 2005, devrait certainement renforcer l�intégration de l�économie turque à celle de l�Europe. Ce processus, amorcé en 1996 avec l�entrée en vigueur du traité d�union douanière � qui prévoyait déjà la reprise d�une partie de l�acquis communautaire, véritable soubassement légal du marché unique en matière de normes techniques, propriété intellectuelle, sécurité du consommateur, conditions de mise sur le marché, etc. �, devrait permettre la modernisation de l�économie, une meilleure attractivité des investissements directs étrangers et un transfert de technologies à grande échelle.
Source : Questions internationales, La Turquie et l�Europe, n° 12, mars-avril 2005.