’’On était à la mi-octobre 2006. Nous avions convenu d’un rendez-vous avec Hrant Dink à son bureau du journal Agos. J’avais mené des interviews sur le thème « Le climat mental et spirituel en Turquie au sujet du problème arménien » avec une trentaine d’universitaires, journalistes, politiciens et intellectuels turcs. Hrant me fit connaître beaucoup d’entre eux. C’était maintenant à lui de répondre à mes questions.
L’atmosphère de son bureau était chaleureuse et nous commençâmes facilement à discuter. Parfois nous coupions l’enregistrement durant cet entretien amical et il me faisait part de ses inquiétudes. Je ne les pris pas au sérieux, mais ce mauvais scénario se révéla vrai deux mois après à peine. Suite à cette interview, nous étions tous deux certains d’avoir réalisé une véritable contribution vis-à- vis de la situation existante. Moi avec mes questions et lui avec ses réponses. On était presque heureux.
J’ai parlé à Hrant une dernière fois le 16 janvier 2007, alors que je me trouvais à Erevan. Je voulais avoir quelques points de vue pour transformer un projet en livre. Nous avons eu une brève discussion. Il m’a dit : « Viens à Istanbul, on se parlera de vive voix.’’
Alin Ozinian
Pouvez-vous me dire pourquoi Agos a été fondé et qui en a eu l’idée ?
La création du journal a été une tâche difficile, car on avait décidé de fonder Agos pour répondre aux besoins de la communauté arménienne de Turquie. Or Agos a été fondé en opposition à certaines réactions négatives. On se posait des questions : pour la communauté, il ne suffisait pas de publier seulement en arménien, car la majorité de ses membres venaient d’Anatolie et il y avait des turcophones. Il y avait un grand manque d’informations dans la communauté, car beaucoup ne peuvent lire la presse arménienne. Comme une société refermée sur elle-même pose un certain nombre des difficultés, il fallait s’adapter à elle. On a dû se battre.
La société turque acceptait d’une autre manière la communauté arménienne : lLe mot « Arménien » était considéré comme une injure ; les Turcs associaient les Arméniens au Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) ou à l’ASALA. Il y avait de grandes inquiétudes et une grande émotion dans la communauté, lorsque le problème du Kharabagh a été débattu en Turquie.
On vivait comme des vers de terre. On entendait ce qui était dit à la télévision, mais on ne pouvait rien faire. On s’opposait, on criait, on disait que tout cela n’était que mensonge, mais on ne pouvait s’exprimer à haute voix. Il fallait casser la glace, c’était nécessaire. Un jour, le patriarche Ghazanchian nous a invité pour nous dire que le journal Sabah avait publié une photo d’un prêtre arménien et d’Abdullah Ocalan, avec cette légende : « Voilà la preuve de la collaboration des Arméniens et du PKK. »
Sa Sainteté nous a appris qu’il s’agissait d’un mensonge, que ce prêtre n’était pas un Arménien. Il m’a demandé, ainsi qu’à mes amis présents ce jour-là, ce que nous pensions de tout cela. J’ai donné mon avis et j’ai proposé d’organiser une conférence de presse. C’était une action courageuse, toute la presse locale et internationale est venue et cela a été un grand succès. L’impression était indescriptible. Après cette réunion, j’ai dit qu’il était absurde d’organiser une conférence de presse à chaque fois, et que nous devions prendre de vraies mesures. Et j’ai proposé de publier un journal.
On le gérait avec mes amis. Puis ils sont partis et je me suis retrouvé seul à le gérer. Avec ce journal, on voulait aussi créer une sorte d’atelier de réflexion pour jeunes sociologues et intellectuels.
Quels problèmes avez-vous rencontrés au moment de la création du journal et ensuite ?
Le premier problème était le conservatisme de la communauté. La presse arménienne locale ne montrait guère de sympathie à notre égard. Il y avait des gens qui pensaient qu’on travaillerait juste quelques mois, ou au mieux un an, or nous travaillons depuis 10 ans déjà !
Certaines personnes pensaient que c’était une régression d’être publié en turc. Mais nous avons bien agi en utilisant le turc pour la communauté. Je suis sûr qu’ils en sont déjà convaincus.
Quand vous avez fondé le journal, pensiez-vous que ce serait mieux pour les Turcs de lire un journal et d’avoir des nouvelles sur la communauté arménienne ?
Notre principal objectif était d’être une fenêtre ouverte sur la société au sens large. Je pense que c’est là une part de notre succès.
Nous avons réussi à débattre de nos problèmes à égalité avec ceux de la Turquie. Nous pensons que seule une démocratisation de la Turquie permettra de régler ces problèmes. La communauté a rapidement commencé à s’intéresser aux principaux problèmes de la société de Turquie. Avec Agos la société arménienne a combattu plus courageusement pour son identité. Grâce à cet appui elle a commencé à ne plus avoir peur.
Parlez-nous des spécificités en tant qu’éditeur, publiant un journal dédié spécialement à une minorité en Turquie ? Présentez-nous vos points de vue sur la liberté de la presse en Turquie.
Une minorité n’a pas de difficulté particulière à publier un journal. Si vous n’êtes pas un éditeur à principes, si vous n’avez pas une certaine motivation politique, si vous êtes plus souvent intéressé par les nouvelles illustrées, alors vous ne n’avez pas de difficultés professionnelles. Mais si vous êtes un journaliste avec certaines idées précises, vous êtes sûr d’avoir des problèmes.
Récemment, nous avons connu certaines difficultés habituelles liées à la liberté de la presse, par rapport au nouveau code pénal de la Turquie et à la loi sur la presse. On est un peu sous contrôle. Nous avons essuyé des revers : le journal a été saisi plusieurs fois.
Je pense que ne nous méritons pas cela et la seule raison est notre attitude par rapport au problème arménien. Je suis sûr que c’est cela la raison, mais nous n’avons pas encore baissé les bras, nous allons de l’avant.
Parlons du rôle de l’Union Européenne pour la Turquie. Est-il nécessaire pour la Turquie de devenir membre de l’Union Européenne ?
C’est un processus irréversible pour la Turquie. Il est nécessaire de comprendre que les raisons de la Turquie pour entrer dans l’Union Européenne sont plus qu’un simple désir. La véritable raison est la peur. Voilà pourquoi ce processus évolue aussi lentement. Et pourquoi la Turquie a-t-elle peur ? C’est la peur de l’instabilité et cette peur est mutuelle. C’est à cause de cette peur que ce processus continue et il n’est pas possible de revenir en arrière.
Si les militaires rejettent définitivement l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne, ce processus n’aboutira pas. Si nous ne devenons pas membre de l’Union Européenne, un jour nous devrons quitter aussi l’OTAN. Le processus avance très lentement, parce qu’il n’existe pas de grand désir de devenir membre de l’Union Européenne. Je ne pense pas qu’il sera possible d’arrêter le processus. On peut le ralentir, parfois le geler, mais on ne peut pas l’annuler.
Si nous observons l’histoire de cet État, trois périodes importantes la marquent sur le dernier demi-siècle. Le premier a été la période de la Guerre froide, quand le pays avait des problèmes avec des mouvements d’extrême-gauche, qu’il a interdits. Durant la seconde période, les forces religieuses prirent le pouvoir en Iran. En Turquie les islamistes demandèrent à participer à l’administration du pays et aujourd’hui ils sont arrivés au pouvoir. La troisième période est le processus d’adhésion à l’Union Européenne et jusqu’à présent rien n’a influencé davantage la Turquie. Le processus n’a laissé aucun groupe homogène en Turquie. Aujourd’hui, certaines forces parmi les militaires, les bureaucrates, les universitaires et les médias expriment leur opposition à l’Union Européenne.
Quel est le plus grand obstacle au processus d’européanisation et de modernisation de la Turquie ?
Les réactions d’opposition viennent des classes défavorisées comme des classes supérieures. La législation est favorable à la classe supérieure. C’est le premier obstacle. Le second grand obstacle est la peur ressentie par la classe supérieure. La Turquie occupe un espace moindre que celui de l’empire ottoman, ce qui justifie à ses yeux le refus de perdre davantage. Ce que l’on peut aussi appeler le « syndrome de Sèvres ». Chaque changement provoque craintes et doutes en Turquie. Voilà pourquoi les changements sont si lents en Turquie.
La Turquie est à la fois un carrefour et une frontière entre l’Ouest et l’Est. Je pense que Malatya est une frontière en Turquie. L’Est et l’Ouest de Malatya sont des mondes très différents.
La Turquie est effectivement un pays qui a une importance stratégique considérable, mais qui dépend à la fois de l’Est et de l’Ouest. Compte tenu de la situation, il serait injuste d’attendre une adaptation rapide de la part de la Turquie.
Une des principales raisons, pour lesquelles les changements ne se font pas aisément, est cette nouveauté bâtie en Turquie d’une identité supérieure créée et imposée à toute la société. Voilà pourquoi les Turcs craignent de connaître leur véritable histoire. Tout autre commentaire historique a l’effet d’un tremblement de terre pour cette identité. Ce tremblement de terre est aussi une menace pour l’Europe. Cette identité pourrait s’écrouler, mais sur qui ? Cela reste flou…
Des réformes peuvent-elles avoir lieu dans le domaine de la démocratie et des droits de l’homme, durant le processus de conformité aux exigences de l’Union Européenne ?
Je n’en doute pas, mais c’est un processus difficile. Des lois seront peut-être votées, mais lorsqu’elles seront mises en application, il y aura des oppositions… Un changement de mentalité est nécessaire, et la démocratie va changer suffisamment les façons de penser. Plus les mentalités changeront, plus rapide sera la démocratisation.
On observe toutefois dans certaines situations que les gens sont perturbés. Par exemple, la liberté de pensée est considérée comme de la haute trahison (article 301 du code pénal turc) et la liberté de religion, de conscience (le foulard) sont parfois acceptées comme une régression. Quelle en est la raison ? Les gens sont-ils en réalité prêts pour ces réformes ?
Aujourd’hui on parle d’une montée du nationalisme, mais je ne crois pas que le nationalisme augmente. Certains le font monter. C’est devenu plus évident ces deux dernières années. Ces gens font tout leur possible pour influencer les prochaines élections en Turquie.
Ils font des plans pour renverser le parti de la Justice et du Développement (AKP). Mais ils n’ont pas de prétexte économique, ni démocratique. Nous voulons toujours inspirer des nationalistes et cela se fait partout, lors des funérailles de martyrs, contre l’Union Européenne ou en accueillant le Pape.
Je pense que toute la souffrance qu’expriment ces réponses sont les prochaines élections. Ils ne veulent pas donner de sièges aux islamistes dans le gouvernement. Nous verrons bien…
Êtes-vous d’avis qu’il existe des différences en Turquie fondées sur les racines ethniques ? Pouvez-vous parler des raisons qui en sont la cause et des conséquences ?
S’agissant des racines ethniques, il y a sans aucun doute des attitudes variées. Un simple exemple : aujourd’hui, non seulement les musulmans, mais aussi les chrétiens, les Arméniens, devraient se retrouver en haut de la hiérarchie sociale, militaire, policière, au sein de différents services gouvernementaux et ministériels. La cause principale est la sécurité. La Turquie a pris en compte le contexte des minorités et le gère comme un sujet de sécurité.
Je dirais qu’il y a des réalités, qui sont mathématiques. Sur les 300 000 Arméniens de la période [du traité] de Lausanne, il n’en reste aujourd’hui que 60 000, tandis que la population turque est passée de 13 à 70 millions. Alors que l’un augmente, comment se fait-il que l’autre diminue ? Il était nécessaire de diminuer le nombre des minorités.
Quelques points cruciaux sont apparus, par exemple la loi sur la taxe foncière du 6 septembre 1955, mais ce qui est arrivé est déjà du passé. En outre, pour leur propre sécurité et leur santé, les Arméniens ont quitté la Turquie à cause de problèmes économiques et moraux.
Et ceci. Vous ne trouverez dans aucun manuel scolaire mention des minorités, en particulier des Arméniens. Ces faits relatifs aux minorités ne sont consignés que dans le manuel de la Sécurité Nationale. A l’école primaire, il n’est même pas écrit « Ali donne un ballon à Hakob » ; Ali le donnera toujours à Veli. Quand nous les lisons, nous n’existons nulle part.
Ce n’est que dans les manuels de la Sécurité Nationale que vous pouvez trouver le mot « Arméniens », qui prend place dans le chapitre des groupes parasites qui trichent avec la Turquie.
Comment voyez-vous les relations entre la Turquie et l’Arménie ?
On peut parler de relations non existantes. Je constate qu’il n’y a aucune relation depuis que l’Arménie a acquis son indépendance. Au départ, les États-Unis ont tenté de prendre quelques mesures, puis l’Union Européenne, mais en vain. Le désir existe, mais il est très faible.
La Turquie ne s’est pas encore faite à l’idée que l’Arménie est un pays caucasien indépendant. Il s’agit d’un État, d’un voisin, la Turquie devrait le comprendre et entamer des relations avec lui . Quand la politique d’État échoue, la politique d’opinion, celle de la société civile prend le relais. Il y a eu quelques tentatives pour établir des relations non gouvernementales des deux côtés, mais elles sont très minces, très rares.
Selon vous, comment faut-il appeler les événements de 1915 ?
Je n’ai aucun doute. Ce fut un génocide.
Que pensez-vous des relations diplomatiques sans conditions préalables que suggère l’Arménie et du comité d’historiens proposé par la Turquie ?
Je ne pense pas que l’attitude de la Turquie soit sincère. La partie arménienne est plus sincère.
Pourquoi ? Avez-vous des doutes que ce comité d’historiens ne serait d’aucune utilité ?
Oui. Chacun pense que ce comité d’historiens ne servira à rien. Comme toujours, la même politique se poursuivra sans relations ni résultats. Voilà ce qu’aime la Turquie : aucune relation. Je pense que l’Azerbaïdjan impose aussi cette politique à la Turquie. La partie arménienne est plus raisonnable et plus volontaire.
Que pensez-vous d’un État tiers qui pourrait interférer dans ce problème et des lois reconnaissant le génocide, votées dans les parlements à travers le monde ?
Mon point de vue dans ce domaine peut paraître romantique mais je n’en changerais pas. Je pense que la Turquie comme le reste du monde se sont comportés de manière hypocrite dans le processus de reconnaissance du génocide des Arméniens. Le monde savait depuis longtemps la réalité de ce génocide. Ils y étaient impliqués directement et y avaient pris un rôle important. Maintenant, 85 années plus tard, la France reconnaît les faits, je trouve cela très indécent. Non seulement c’est très indécent, mais en plus la France utilise ces événements pour ses propres intérêts. C’est très douloureux pour moi, en tant qu’Arménien, de voir ma tragédie utilisée comme un atout politique sur la scène internationale. Je ne peux cautionner cela et je m’y oppose. Les États tiers ne m’intéressent pas.
Je pense que le problème devrait être réglé entre la Turquie et l’Arménie. Et il ne devrait pas être réglé au travers de lois qui punissent, mais au moyen de la morale. Nous n’avons pas besoin de lois qui punissent pour avoir une morale, notre conscience suffit.
Je crois que ces deux États peuvent y parvenir, mais je ne suis pas prophète.
Distinguez-vous les Arméniens entre ceux qui vivent en Arménie, à l’étranger et en Turquie, quand vous évoquez la question arménienne ?
Pas seulement à ce propos. Je le fais en général. Pour la diaspora, la Turquie est un État lointain et fascinant, mais pour l’Arménie c’est un État voisin, qui empêche l’Arménie d’être indépendante. Pour les Arméniens qui vivent en Turquie, la Turquie est leur patrie.
Bien qu’en disant cela, je ne veuille ni diviser les Arméniens, ni adopter le point de vue de la Turquie.
La Turquie devrait établir de bonnes relations avec chaque État. Mais ces deux États devraient se mettre d’accord pour régler le problème. Je ne pense pas que les Arméniens vivant en Turquie doivent être impliqués dans ces discussions, car ils sont citoyens de Turquie.
En tant que citoyen de Turquie, êtes-vous préoccupé par la fermeture de la frontière arméno-turque ? Que pensez-vous de la politique de la Turquie envers l’Arménie, qui considère les problèmes de l’Azerbaïdjan comme les siens et pose des conditions préalables dans ses relations avec l’Arménie ?
Sous le gouvernement Demirel, il y avait de bonnes relations entre la Turquie et l’Azerbaïdjan. La Turquie tente d’établir des relations avec l’Arménie en prenant en compte les relations arméno-azerbaïdjanaises. Pour être franc, la Turquie ne désire pas nuire à l’Azerbaïdjan dans ses négociations avec l’Arménie. Et l’Azerbaïdjan ne permet pas à la Turquie de négocier avec l’Arménie en se servant du problème du Kharabagh.
Toute force nationaliste résoudrait ce problème d’une manière anti-azerbaïdjanaise. La Turquie adopte aussi cette position et ne considère pas l’Arménie comme un pays voisin.
Tout d’abord, la Turquie a réduit à néant la question arménienne, mais comme l’Arménie a acquis son indépendance, la question a ressurgi à nouveau. La Turquie vit tout d’un coup un fantôme arriver et la même question réapparut : comment faire avec l’Arménie ? La Turquie se trouvait dans une situation désespérée, c’est alors que le problème du Kharabagh émergea, elle s’y agrippa de toutes ses forces, s’en réjouit et demanda de l’aide. La Turquie pensait que cela prendrait beaucoup de temps. C’est une continuation de sa politique…
Selon vous, la république de Turquie est-elle la continuation historique de l’empire ottoman ?
Je n’attends d’excuses ni de responsabilités de personne. Je suis celui qui comprend les douleurs de cette nation et en porte le fardeau. Je ne songe à aucune compensation financière ni à une quelconque restitution des terres. Pour moi, il est important de réparer des relations que le passé a brisées, de savoir qui et quelles circonstances ont joué un rôle. Les États européens peuvent aussi avoir un effet positif, compenser leur culpabilité et tenter d’alléger le désaccord en trouvant des plates-formes économiques et culturelles avantageuses pour faire que les deux États se rapprochent.
Peut-on dire que le rôle de l’« Ittihat ve Terraki » [le Comité Union et Progrès] fut important dans cette affaire ?
Il n’y a pas eu qu’un seul groupe responsable, il y eut des collaborateurs qui encouragèrent et ont fermé les yeux sur tout cela. Aujourd’hui, il existe aussi des gens qui refusent que cette réalité soit connue du monde entier.
Si vous cherchez des responsables, ils sont nombreux, chacun a sa part, mais je ne suis pas là pour le rappeler. On peut trouver ça très romantique, mais chacun doit reconnaître ses fautes.
Tentons d’analyser quels sont les principaux problèmes des deux États.
Des déceptions, une mauvaise volonté, l’inimitié et la peur… Aujourd’hui existent des peurs nouvelles. Les Arméniens craignent aussi que nous devions nous intéresser à eux. Les Arméniens sont pris en étau entre l’Azerbaïdjan et la Turquie. Ce sont deux États répressifs à droite et à gauche. La peur et l’insécurité sont un handicap important qu’il est nécessaire pour eux d’inoculer.
Nous devons expliquer sincèrement que la Turquie peut être amie avec l’Arménie. La partie arménienne devrait être raisonnable et prendre en compte la situation actuelle. Il existe une Arménie indépendante avec deux voisins qui lui imposent un embargo. L’Arménie ne peut relâcher cette pression qu’au sud, mais il y a cette administration des mollahs, dont on ne sait combien de temps elle va durer.
La diaspora devrait réfléchir à cela. L’Arménie devrait établir de bonnes relations avec ses voisins et devenir membre de l’Union Européenne. Si l’Arménie était membre de l’Union Européenne, la Turquie serait aujourd’hui soumise à un embargo, non de l’Arménie, mais de l’Europe.
Au lieu de voter des lois dans les parlements de différents États, la diaspora ferait mieux de persuader ces États d’accepter l’Arménie dans l’Union Européenne. Ceux-ci devraient se souvenir de leur histoire et de leurs responsabilités, car ils ont leur part de responsabilité dans la situation actuelle. La diaspora devrait au moins déclarer qu’elle agit pour cela. Voilà ce que je propose pour aller de l’avant. Nous devrions aussi demander des comptes aux Européens sur les positions qu’ils ont prises par le passé.