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Monsieur le premier ministre, réveillez-vous !

mardi 5 avril 2011, par Pierre Vanrie

Le débat sur le nucléaire en Turquie, quasi inexistant jusque-là, s’étale maintenant dans la presse, d’autant que le pays vit également dans l’angoisse d’un tremblement de terre majeur.

Hasan Cemal, célèbre éditorialiste du quotidien libéral Milliyet, déclare aujourd’hui son rejet total du nucléaire alors qu’il n’avait jamais exposé son point de vue sur la question.

« J’en appelle au Premier ministre pour qu’il renonce immédiatement au projet de centrale nucléaire à Akkuyu, écrit-il. Je pense même que, après ce qu’il s’est passé au Japon, s’entêter dans cette voie pourrait s’apparenter à un crime contre l’humanité. L’énergie nucléaire n’est pas indispensable. Elle n’est ni bon marché ni sûre. Pendant des années, on nous a raconté n’importe quoi sur ce sujet. »

Sahin Alpay, dans le quotidien islamique modéré Zaman, va dans le même sens.
« A cause d’intenses activités de lobbying en faveur du nucléaire, une majorité écrasante de l’opinion turque ignore tout des risques inhérents à cette énergie. On lui a ainsi fait gober que les centrales étaient le symbole de la modernité. C’est sans doute pour cela que le Premier ministre pense que son attitude en faveur de l’atome lui fera gagner des voix. Mais, en agissant ainsi, il commet peut-être une erreur. Les lecteurs de Zaman savent que je n’hésite pas à féliciter l’AKP [le Parti islamique modéré au pouvoir] pour ses performances en matière économique et en faveur de plus de démocratie. Toutefois, il convient de dire que l’insensibilité du gouvernement vis-à-vis de l’environnement, et en particulier son attitude sur le nucléaire, constitue un point noir dans son bilan. »

"Certes, ce n’est pas tous les jours qu’un séisme d’une telle ampleur, suivi d’un tsunami, se produit, mais ce qu’il se passe au Japon oblige tout le monde à reculer au sujet de l’énergie nucléaire. De ce point de vue, la Turquie est sur bien des aspects très concernée. En effet, que se passera-t-il si demain une catastrophe nucléaire se produit dans un pays comme l’Iran, qui se distingue aussi par une forte activité sismique ? Serons-nous en mesure de nous protéger si un séisme se produit en Arménie, où la construction d’une deuxième centrale nucléaire est prévue ?

Dans peu de temps la Turquie entamera la construction de sa première centrale nucléaire. Selon le Premier ministre Erdogan, dans la mesure où il n’y a aucun risque, il n’est pas question de renoncer à l’énergie nucléaire. Nul n’ignore que les questions d’environnement ne sont pas prises très au sérieux en Turquie, et en particulier par l’AKP.
La dégradation des sites naturels, culturels et historiques est ainsi considérée comme secondaire par le gouvernement AKP. Dans ces conditions, n’a-t-on pas le droit de réclamer que le Premier ministre fasse preuve de davantage de sensibilité à l’égard du nucléaire ?" écrit Soli Özel dans le quotidien populaire Habertürk.

Dans le quotidien nationaliste Hürriyet, Yalçin Dogan fait, lui, remarquer que la centrale d’Akkuyu se trouvera à 25 kilomètres à peine de la faille d’Ecemis et qu’une société russe a obtenu le contrat de sa construction sans appel d’offres. "Le Premier ministre a déclaré qu’il n’y avait pas d’investissements sans risques, sans quoi même le gaz de ville ou en bouteille devrait être abandonné, écrit-il. Il compare ainsi les dégâts causés par une bouteille de gaz, qui peut toucher quelques personnes, à des fuites radioactives touchant des millions de personnes et dont les effets se feront sentir sur plusieurs générations !
Y a-t-il quelqu’un pour expliquer à Recep Tayyip Erdogan les conséquences dramatiques de fuites radioactives ?"

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Sources

Source : Courrier International du 24 mars 2011

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