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Immigration : des démographes remettent les pendules à l’heure

mardi 2 mai 2006

AFP - Paris - 28/04/2006

Loin des clichés souvent véhiculés de hordes d’immigrants allant sans cesse croissant, plusieurs démographes font remarquer que l’on est aujourd’hui globalement bien en-dessous des niveaux d’immigration du début du XXe siècle.

« Dans les années 1900, explique Hervé Le Bras, démographe et directeur de recherche à l’Ined, la population des Etats-Unis augmentait annuellement grâce à l’immigration de 1,5% par an tandis que des pays comme l’Italie en perdait 1% ».

« Aujourd’hui, poursuit-il, si nous avions des niveaux d’immigration analogues, les Etats-Unis gagneraient 4,5 millions d’habitants par an et la France environ 600.000 ».

Avec l’arrivée pour la seule France, en 2004, de quelque 140.000 entrants réguliers, et de 80.000 à 100.000 entrants irrégliers - un chiffre cité par Nicolas Sarkozy -, on est effectivement loin du compte.

« S’il est vrai, dit pour sa part Jean-Christophe Dumont, économiste à l’OCDE, que sur les vingt dernières années, il y a eu une augmentation des entrants en France, ce pays se situe pourtant, avec deux entrées d’étrangers pour 1.000 habitants en 2002, tout en bas de l’échelle des pays de l’OCDE », juste avant la Finlande et la Hongrie.

A titre de comparaison, le Canada et le Royaume Uni comptent huit entrées d’étrangers pour 1.000 habitants, l’Italie sept pour 1.000 et la Suède cinq pour 1.000.

Hervé Le Bras relativise aussi l’importance des flux migratoires en France. « Face aux 7 à 11 millions d’immigrés irréguliers qu’il est en ce moment question de régulariser aux Etats-Unis, dit-il, à proportions égales, il s’agirait de régulariser, en France, quelque 1,4 millions de sans-papiers ».

Les démographes s’appliquent aussi à démonter une autre idée reçue : avec plus de sept personnes sur dix admises au séjour en France pour des motifs familiaux et une immigration « de travail » de seulement 5%, la France serait aux antipodes de pays comme le Canada qui privilégient les entrants munis de visas de travail.

A cela, Jean-Christophe Dumont répond que les trois quarts du rapprochement familial concernent les conjoints de Français et que l’immigration pour motifs familiaux domine dans la plupart des pays de l’OCDE, y compris aux Etats-Unis et au Canada où ce type de flux se situe aux environs de 50%.

Autre cliché, la France serait actuellement un pays d’immigration et non d’émigration. « Bien qu’il n’existe aucun moyen de mesurer les départs de France, indique Hervé Le Bras, pour la seule Grande-Bretagne, les chiffres sont édifiants : 45.000 Français y résidaient en 1993, ils sont aujourd’hui 125.000 ».

« En revanche, souligne-t-il, la France n’attire pas les Anglais ou les Canadiens aux mêmes rythmes ».

Il fait par ailleurs remarquer que sur les 2 millions de Français (binationaux compris) résidant à l’étranger, et considérés comme seulement « expatriés », bon nombre sont probablement durablement installés dans leur nouveau pays de résidence.

Une autre idée battue en brèche par les démographes : l’immigration pourrait résoudre les problèmes démographiques de la France et, plus généralement, de l’Europe des Quinze. Faux, répond Hervé Le Bras, qui cite une étude selon laquelle, si l’on voulait garder la même proportion d’actifs et de retraités en France dans les prochaines années, il faudrait un flux de 900.000 entrants.

aml/ls/ds

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