Comment diable font les Turcs pour servir des salades qui ont l’air d’avoir été cueillies deux heures plus tôt !? Les fraises sont charnues et ont un goût de fraises fraîches. Mais c’est avec les cerises que le test ne pardonne pas : ces fruits perdent leur goût une demi-journée après avoir été cueillis. Pourtant en plein Istanbul, les cerises ont encore le goût de cerises, tandis qu’à Casablanca, elles n’en ont plus que la forme.
Tout le monde au Maroc sait cela : bien rares sont les endroits où l’on peut trouver des fruits et légumes corrects. Les feuilles de salade, même dans les restaurants de luxe sont « en deuil », c’est-à-dire bordées d’ocre car elles ont été acheté trois jours plus tôt, lavées et découpées de l’avant-veille puis mises en attente sans grande précaution au réfrigérateur. C’est sans doute confortable pour les commerçants et les cuisiniers, mais c’est inqualifiable pour les clients.
Des détails de cette nature disent clairement que toute la chaîne de production se moque ouvertement de la clientèle. Difficile d’imaginer le développement du tourisme avec de telles pratiques.
L’effort turc a porté sur tout le processus, du champ à l’assiette : sélectionner des variétés qui supporteront parfaitement les circuits commerciaux, raccourcir ceux-ci au maximum, mais aussi apprendre au personnel, dans des écoles et dans des cours du soir, comment préparer et conserver les fruits et légumes.
Est-elle chère cette professionnalisation ? Sans doute, l’investissement de formation a-t-il été très important. Mais la productivité est au rendez-vous. Aujourd’hui, pour autant qu’il soit possible de comparer, les prix à Istanbul sont un tiers moins élevés qu’à Casablanca. Les paysans turcs sont beaucoup plus riches que les paysans marocains, et vers 15h, les serveurs des restaurants partent au volant de leur petite voiture.
N.S