Turquie-Europe-PKK : Perquisitions dans les milieux kurdes en Belgique

Bruxelles, Correspondant

Quelque 300 membres de la police fédérale ont mené 25 perquisitions visant des milieux kurdes dans plusieurs villes belges, jeudi 4 mars. Vingt personnes au total ont été appréhendées, a confirmé, dans l’après-midi, le parquet fédéral.

Les perquisitions découlaient d’indices relatifs au financement illégal du PKK, le parti des travailleurs du Kurdistan, qui figure sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne. Une série d’associations soupçonnées de servir de « couvertures » au parti kurde étaient aussi dans le collimateur des policiers.

Selon le parquet, des filières de recrutement de combattants et d’entraînement à la guérilla ont été mises au jour. Des jeunes auraient notamment été envoyés dans des camps militaires en Irak et en Grèce et dans des camps d’entrainement du PKK, en Belgique et dans d’autres pays européens.

RACKET SYSTÉMATIQUE

L’enquête évoque aussi le racket systématique, et parfois violent, de commerçants kurdes ainsi que des trafics de drogue. Le parquet a toutefois refusé de détailler ce dernier point. Il veut, dit-il, se limiter, aux « indices sérieux ». Quelque 200 000 euros au total ont été saisis lors des opérations policières de jeudi.

Le siège de la chaîne internationale ROJ TV, qui émet dans 70 pays depuis Denderleeuw, en Flandre, était lui aussi visé. Des scellés ont été apposé sur le bâtiment et du matériel technique saisi. La radio, Mesopotamia, liée à ROJ TV, aurait servi de moyen de communication opérationnel aux combattants du PKK.

En avril 2008 déjà, des actions policières avaient visé des associations à Verviers, dans l’est de la Belgique. Elles étaient soupçonnées d’organiser des camps d’entraînement pour des combattants du mouvement, dont des femmes.

Le PKK lutte pour l’indépendance du Kurdistan et fait l’objet d’une sévère répression par les autorités turques. Il y a deux semaines, des opérations menées dans dix provinces de l’est et le sud-est de la Turquie ont abouti à l’arrestation de 86 personnes soupçonnées d’entretenir des liens avec le parti.

La Turquie fait, depuis longtemps, pression sur les Etats européens pour qu’ils répriment plus sévèrement les activités du parti kurde. La Belgique affirme cependant que l’action de jeudi n’a rien à voir avec des opérations menées récemment dans les Etats voisins.

Ankara est très irritée par le fait que la justice belge a, à la fin de 2009, acquitté certains membres du DHKP-C, une organisation d’extrême gauche qui a commis des attentats en Turquie. Le parquet fédéral avait traduit plusieurs personnes devant les tribunaux pour « terrorisme » et « appartenance à une organisation criminelle ». Après de nombreuses péripéties, la justice avait abandonné l’essentiel de ces accusations.

Jean-Pierre Stroobants