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La Turquie avance au ralenti vers l’Union européenne

samedi 16 septembre 2006, par Guillaume Perrier

LE MONDE

ISTANBUL CORRESPONDANCE

Malgré les avertissements répétés des responsables européens tout au long des derniers mois, la crise couve entre la Turquie et l’Union européenne, peu satisfaite du rythme des réformes menées par le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan. Depuis l’ouverture des négociations d’adhésion, le 3 octobre 2005, plusieurs dossiers cruciaux sont dans l’impasse. Pour tenter de convaincre les dirigeants européens de la bonne volonté turque, le négociateur en chef avec l’UE, Ali Babacan, s’est lancé dans une tournée périlleuse : La Haye mardi 5 septembre et Bruxelles, à partir de mercredi 6 septembre.

Certains craignent, en effet, le risque d’un « déraillement » de la candidature turque, à l’automne, selon l’expression déjà utilisée par le commissaire européen à l’élargissement, Olli Rehn, en juin. Le think-tank bruxellois Les amis de l’Europe a jugé, dans un rapport publié mardi, les scénarios de « la voie de garage » ou du « grave accident de train » comme étant les plus plausibles.

Car la Turquie a nettement réduit le rythme de ses réformes structurelles. C’est ce qu’a souligné le rapport présenté, lundi 4 septembre, par l’eurodéputé néerlandais (Parti populaire européen, droite) Camiel Eurlings, devant la commission des affaires étrangères du Parlement de Strasbourg. « Des progrès insuffisants » sont soulignés, notamment concernant le « traitement équitable des minorités religieuses » chrétiennes ou alévies, et « en matière de liberté d’expression, de relations entre civils et militaires, de droits des femmes, de droits syndicaux ». « Le rapport Eurlings est un avant-goût du rapport régulier que la Commission européenne doit rendre en octobre, prédit Cengiz Aktar, universitaire, spécialiste des questions européennes à l’université de Bahçesehir d’Istanbul. Il en dit long sur les relations actuelles entre la Turquie et l’UE : il aborde les sujets qui fâchent et montre que Bruxelles n’attend plus rien d’Ankara. »

L’OUVERTURE DES PORTS

Le principal point de blocage reste l’application du protocole portant sur l’union douanière entre la Turquie et l’UE élargie aux dix derniers membres intégrés, dont Chypre. « Cet engagement doit être respecté, a prévenu, samedi 2 septembre, le ministre finlandais des affaires étrangères, Erkki Tuomioja (la Finlande assure la présidence tournante de l’UE). Sinon au minimum (...), nous devrons suspendre les négociations d’adhésion sur tous les sujets liés au marché unique. » « Nous attendons une démarche réciproque, justifie Yasar Yakis, le président (AKP) de la commission des affaires européennes au Parlement d’Ankara. Nous nous sommes engagés à ouvrir nos ports mais l’UE doit lever l’embargo commercial contre la partie turque de Chypre. »

Devant ces difficultés, la Turquie a perdu de sa fougue. D’autant plus qu’à la veille d’une année électorale chargée, les réformes risquées restent en attente. La puissante organisation patronale turque, la Tüsiad, principal soutien de la candidature à l’UE, s’en est pris au gouvernement. « C’est vrai qu’il y a un ralentissement et un désintérêt pour les questions européennes, a déclaré, mercredi 30 août, Aldo Kaslowski, le président de Tüsiad-International. Nous devons faire plus d’efforts. »

Mais, au-delà des milieux d’affaires, déjà tournés vers l’Europe, la population turque penche nettement vers l’euroscepticisme. Selon un sondage publié le 30 août par le quotidien Vatan, 76 % des Turcs ne font pas confiance à l’UE.

Guillaume Perrier
Article paru dans l’édition du 07.09.06

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