Après le clash entre Bruxelles et Paris sur le dossier de la délocalisation d’une usine Renault en Turquie, la gardienne des règles de concurrence a fait une petite mise au point au sujet de Nicolas Sarkozy...
Entre Nicolas Sarkozy et la commissaire européenne à la Concurrence sortante, Neelie Kroes, rien ne va plus. Cette dernière, passablement échaudée par les pressions du gouvernement français sur Renault pour l’empêcher de délocaliser, estime qu’elle a deux fois plus de neurones que Nicolas Sarkozy.
Toutefois, à en croire le Canard Enchaîné, c’est Sarkozy qui a commencé. Selon l’hebdomadaire, le président français aurait déclaré qu’il n’attribuait « pas deux neurones » à la gardienne des règles de concurrence, qui cède cette semaine sa place à l’Espagnol Joaquin Almunia. Dans une interview publiée lundi dans le journal économique allemand Handelsblatt, elle répond aux propos prêtés au président français : « Dans ce cas, j’en ai toujours deux fois plus que lui », déclare-t-elle. « Les chefs d’Etat peuvent parfois se montrer très créatifs quand il s’agit de faire des bons mots. » L’entourage de Nicolas Sarkozy a démenti qu’il ait porté un tel jugement sur la commissaire néerlandaise. « A l’Elysée, on ne fait pas de commentaire et on dément les propos prêtés au président de la République par Le Canard enchaîné », déclare une source à la présidence.
« Stratégie vouée à l’échec »
Mais la vigueur de la réponse de Neelie Kroes, qui a été nommée commissaire chargée de la stratégie numérique dans la prochaine Commission, illustre les tensions qui subsistent entre Paris et Bruxelles sur le dossier automobile. Neelie Kroes s’était publiquement inquiétée le mois dernier des interférences du gouvernement français dans la gestion de Renault pour forcer le constructeur automobile à ne pas délocaliser la production de sa Clio 4 en Turquie.
Pour Nicolas Sarkozy et son ministre de l’Industrie, Christian Estrosi, les constructeurs français doivent produire en France les modèles qu’ils destinent au marché français. Neelie Kroes a estimé dans son interview à Handelsblatt qu’il s’agissait d’une stratégie vouée à l’échec. « Si l’industrie française devait produire seulement pour le marché français, elle ne se rendrait pas service », a-t-elle déclaré. « Les voitures françaises sont après tout exportées vers beaucoup de pays à l’intérieur et à l’extérieur de l’Europe. »
Lors d’une réunion le 16 janvier dernier entre Nicolas Sarkozy et le PDG de Renault, Carlos Ghosn, ce dernier a annoncé que la prochaine Clio serait fabriquée à Flins (Yvelines) et en Turquie, sans précision sur la répartition. Christian Estrosi avait brandi la menace d’une augmentation de la participation de l’Etat dans le capital de Renault, qui est aujourd’hui de 15%, pour peser sur sa stratégie industrielle.