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Les groupes turcs passent à l’offensive

mardi 20 septembre 2005, par Laure Marchand

Le Figaro - 20/09/2005

Istanbul : Au mois d’octobre, le premier ministre, Tayyip Erdogan, se rendra en Algérie, accompagné d’une bonne centaine d’hommes d’affaires. Une impressionnante délégation, à l’image des ambitions des entreprises turques. Dans tout le monde arabo-musulman et en Asie centrale, une aire géographique qui s’étend de l’Afghanistan au Maghreb, en passant par le Caucase, la Turquie prend des positions dominantes. L’opérateur téléphonique Turkcell est présent en Azerbaïdjan, en Géorgie ou en Moldavie. Et si l’appel d’offres remporté pour le deuxième réseau de téléphonie mobile en Iran n’est pas annulé par les durs du régime de Téhéran, la Turquie devrait passer en tête des investisseurs dans ce pays.

Les groupes turcs se distinguent également dans le textile ou les travaux publics. De Tripoli à Tachkent, Gama, STFA ou Alarko bâtissent hôpitaux, autoroutes, palaces et ponts. Ce sont les Turcs encore qui sont appelés pour satisfaire la dernière lubie du dictateur turkmène : un zoo en plein désert pour héberger des pingouins...

Au premier rang des réussites, TAV affiche un chiffre d’affaires de 640 millions d’euros et un succès fulgurant bâti sur la gestion d’aéroports. Ce joint-venture, créé en 1997 pour construire le terminal international d’Istanbul, a remporté le marché du nouvel aéroport de Monastir en Tunisie, a gagné en 2004 l’appel d’offres du troisième terminal du Caire au nez et à la barbe de Vinci et de Bouygues, et vient de décrocher celui de Tbilissi tout en concurrençant les Français pour l’aéroport de Casablanca.

Les Turcs construisent vite avec un excellent rapport qualité-prix. « Ils ont des techniciens aguerris et sont durs à la tâche », résume un connaisseur français. « Nous sommes bien plus compétitifs que les Européens et prenons plus de risques, confirme Sani Sener, le directeur général de TAV. La situation géographique de la Turquie réduit considérablement les coûts. »

« La proximité culturelle joue également dans les relations avec les distributeurs », ajoute Cem Akant, responsable du développement chez Arçelik, le géant turc de l’électroménager. D’ailleurs, Ankara a lancé en 2000 « la stratégie des pays voisins et périphériques » pour renforcer les liens avec ses zones d’influence historiques : l’ex-empire ottoman et l’Asie centrale.

Tous ces pays ou presque ont en commun d’être musulmans. Le gouvernement AKP, issu de la mouvance islamiste, y dispose de solides réseaux. Le Müsiad, organisation de patrons islamistes turcs, développe les relations avec les pays frères. Ils ont milité pour qu’un accord de libre-échange soit signé avec la Palestine. Fin septembre, ils participeront à un forum islamique international organisé en Arabie saoudite. L’an dernier, le montant des projets turcs au Moyen-Orient a atteint 1,8 milliard d’euros.

La Turquie joue sur tous les tableaux, en fonction du contexte politique. En Irak, l’alliée des Etats-Unis a eu sa part du gâteau : deux milliards d’euros de contrats et de projets depuis la chute de Saddam Hussein. Deux sociétés sont préqualifiées pour la construction de l’ambassade américaine à Bagdad. Le bras seur Efes Pilsen exporte déjà sa bière en Irak et cher che un partenaire pour produire sur place. « Nos sociétés sont également très actives en Afghanistan, souligne Yasemin Uluevren du DEIK, le Conseil des relations économiques extérieures. Le fait que l’Otan y soit commandé par la Turquie a favorisé leur implantation. » Les Américains sous-traitent la reconstruction.

Les marchés à haut risque n’effraient pas la Turquie. « Au début de la guerre en Algérie, en 1992, nous avons remplacé les Européens », rappelle le DEIK. Un accord de libre-échange devrait maintenant voir le jour entre les deux pays. C’est déjà le cas avec la Tunisie et le Maroc. Au Maghreb, les Turcs ont su imposer leur savoir-faire, des voies ferrées aux centrales électriques. Mais Ankara a encore plus d’appétit. Pour preuve, la délégation que Tayyip Erdogan emmène à Alger.

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