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Les aspirations décalées de la Turquie

dimanche 27 novembre 2005, par Hassane Zerrouky

L’Humanité

Euromed : Ankara qui assure l’essentiel de ses échanges avec l’UE et vise l’adhésion, entretient de nombreuses relations bilatérales avec les pays du pourtour méditerranéen.

La Turquie occupe une place singulière dans l’Euromed. D’une part, elle est concernée par le partenariat euroméditerranéen et, d’autre part, elle a entamé les négociations d’adhésion à l’UE, le 3 octobre dernier, auxquelles elle accorde désormais la priorité. Ce qui fait que l’essentiel de l’activité politique et diplomatique d’Ankara est consacré à l’adhésion à l’UE plutôt que tourné vers le partenariat euroméditerranéen. Non pas que la Turquie, dont plus de 80 % des échanges se font avec l’UE, se désintéresse de la Méditerranée, mais parce qu’en tant que futur pays membre, son statut est de fait appelé à évoluer, voire à être redéfini en conséquence. Son cas ne sera donc pas traité comme le sont par exemple ceux du Maroc ou de l’Algérie. D’ailleurs, les conclusions de la 7e conférence des ministres des Affaires étrangères de l’UE des 30 et 31 mai 2005 au Luxembourg, essentiellement consacrées aux moyens à mettre en œuvre pour accélérer la réalisation de la zone de libre-échange à l’horizon 2010, ne mentionnent presque pas la Turquie. À peine une ligne pour évoquer sa candidature d’adhésion sans faire mention de la question chypriote, alors que Nicosie sera présente à Barcelone comme membre de l’UE.

Le document en question cible surtout les pays du Maghreb en ce qui concerne les questions économiques et de l’immigration clandestine, et le Proche-Orient pour ce qui est de la paix et de la sécurité régionale. C’est sans doute pour ces raisons que la Turquie n’a jamais été associée dans le débat qui s’est institutionnalisé entre les « 5 + 5 », à savoir les pays de l’Europe du sud, France, Italie, Espagne, Portugal et Malte, et l’ensemble maghrébin (Algérie, Maroc, Tunisie, Libye et Mauritanie), auquel participe l’Égypte avec un statut d’observateur quand il s’agit des questions liées à la lutte antiterroriste.

Le peu de progrès réalisé en ce qui concerne la mise en œuvre d’un marché euroméditerranéen n’est sans doute pas étranger au fait qu’Ankara a décidé de développer des relations bilatérales avec chacun des pays du Sud méditerranéen, sous forme de signature d’accords de libre-échange. C’est déjà le cas avec Israël, la Tunisie, le Maroc, en attendant l’Algérie et la Libye envers lesquels Ankara multiplie les efforts pour les convaincre d’en faire de même. On assiste ainsi à un début de réalisation de zone de libre-échange Sud-Sud dont il est trop tôt pour mesurer l’impact sur le développement des économies locales.

Reste que pour l’heure, outre la priorité accordée à l’adhésion à l’UE, Ankara inscrit de plus en plus son action dans le cadre du Grand Moyen-Orient que les États-Unis entendent concrétiser. En effet, par sa proximité stratégique avec Washington, Londres et Tel-Aviv avec qui il a mené dans le domaine militaire des manœuvres aériennes en septembre dernier, Ankara est appelé à jouer un rôle dissuasif en direction des pays du Proche-Orient et de l’Asie centrale turcophone.

Hassane Zerrouky

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