Nyon - Invité récemment par les Rotariens de Nyon-La Côte, pour s’exprimer sur les dangers éventuels de l’islam en Occident, Edouard Brunner, ex-ambassadeur et secrétaire d’Etat, a livré son point de vue.
Sommes-nous menacés par l’islam ?
Je réponds avec un seul mot : NON. L’islam radical n’est pas une menace pour la Suisse. Pour l’instant, contrairement à la France, l’Espagne ou les Etats-Unis, le pays a été épargné par ce phénomène. En général en Occident nous avons des religions monothéistes. L’islam est d’une tendance différente avec des origines différentes.
Contrairement à nos religions, celle-là est très vivace, très entreprenante et reçoit l’aide de certains chefs d’Etats, afin de faire du prosélytisme. D’où son avancée en terre africaine. Sur ce plan, on ne peut que constater qu’ils y croient beaucoup plus que nous. Leurs critères, leurs comportements humains par rapport aux droits de l’homme diffèrent des nôtres. Ces valeurs nous sont connues mais le monde musulman ne s’y reconnaît pas.
Des Européens sont pourtant musulmans ?
En Europe, trois pays sont à majorité musulmane : la Bosnie, le Kosovo et la Turquie. Et à deux reprises, l’Occident, notamment l’Amérique, s’est mobilisé pour sauver le monde musulman d’Europe. Notons qu’en Tchétchénie le problème n’est pas caractérisé par la religion. Il est national. Le cas de la Turquie est intéressant. En 1923 le pays était très retardé. Atatürk l’a modernisé d’un coup en introduisant l’alphabet latin, le code civil suisse et y a interdit tout signe religieux extérieur. Aujourd’hui un Turc d’Istanbul est plus européen que quelqu’un de Guyanne française. Les villes comme Izmir, Ankara rappellent des villes européennes, comme la façon d’être des gens.En Auvergne les paysans ne sont pas plus avancés qu’en Anatolie. Nous ne devrions pas avoir ce sentiment de supériorité occidentale. Du temps de l’empire ottoman, ce pays était l’homme malade de l’Europe. Il était déjà considéré comme faisant partie de l’Europe. Je ne vois pas pourquoi l’Union européenne, plus particulièrement la France, s’oppose à l’adhésion alors, j’en suis convaincu, on peut s’entendre très bien.
Comment expliquez-vous cette cette agressivité envers les pays occidentaux ?
Ce qui crée problème, c’est l’aliénation. Les anti-Soviétiques ont soutenu l’Afghanistan et y ont installé un régime typiquement islamiste : les talibans qui ont essaimé dans le monde et se sont retournés contre nous. A l’origine de cette aliénation arabo-musulmane à notre endroit, il y a le sentiment pas tout à fait faux que l’occident a créé l’Etat d’Israël. Les occidentaux ont pris aux Arabes leurs terres et aujourd’hui on n’a pas seulement les Arabes contre nous, mais tout le monde musulman. Tant que le problème du Proche-Orient n’est pas résolu de façon pacifique et consensuelle, nous en souffrirons.
Que pensez-vous du port du voile islamiste ?
Il doit y avoir une certaine liberté pour autant qu’on ne gêne pas les autres et qu’on ne fasse pas de prosélytisme. Il s’agit d’une tenue vestimentaire. Il faut faire preuve de tolérance, excepté pour deux pays : l’Iran et l’Arabie saéoudite, où on ne peut pas s’habiller comme on veut.
Chez nous les problèmes par rapport à l’islam sont moins virulents. Pourquoi ?
Les musulmans s’intègrent relativement facilement en Suisse et s’y sentent bien.
L’islam d’aujourd’hui est plus libéral d’il y a10, 20 ou 30 ans. Les musulmans sont des gens comme nous, mais qui ont un attachement plus fort et plus agressif à leur foi. Des extrémistes, on en retrouve dans toutes les religions. Ils ne sont pas plus nombreux dans l’islam, simplement ils se font plus remarquer. Leurs coups sont forts et ils font peur. Cette peur est génératrice de haine. Le terrorisme au profit d’une cause est quelque chose que nous connaissons tous.
Maintenant qu’on a introduit le terme de mondialisation, il faut s’habituer aux autres, à la planétarisation.