*Né en 1955, Ahmet Insel est un économiste turc qui enseigne à l’université Galatasaray, à Istanbul. Parfait francophone, Insel a également enseigné à la Sorbonne. Il est connu en Turquie pour son approche critique du néolibéralisme, sa réflexion sur la recomposition de la gauche et son analyse du système politique de son pays. Editorialiste au quotidien turc Radikal, il est aussi membre actif du très sérieux mensuel sociopolitique Birikim. Ahmet Insel est par ailleurs l’un des quatre initiateurs turcs de l’appel demandant pardon aux Arméniens, lancé en décembre 2008.
Économiste et politologue, Ahmet Insel enseigne à l’Université Paris 1 Panthéon Sorbonne et à l’Université de Galatasaray à Istanbul. Il est l’un des fondateurs de la maison d’édition Iletişim, qui publie depuis 1992 les œuvres d’Orhan Pamuk. Il est entre autres l’auteur, avec Michel Marian, de Dialogue sur le tabou arménien (Paris, Liana Levi, 2009)
Allan Kaval, qui a réalisé cet entretien, est journaliste indépendant.
La lutte pour le pouvoir
Quelle est l’histoire des relations entre l’AKP et le (...)
Pour l’universitaire et éditorialiste Ahmet Insel, les événements montrent qu’une nouvelle génération a « pris goût au souffle de la liberté ».
Vous avez dit que la mobilisation actuelle à Istanbul incarnait la « nouvelle Turquie » et que le Premier ministre incarnait, quant à lui, la « Turquie ancienne ». Pouvez-vous nous décrire cette « nouvelle Turquie » ?
Ahmet Insel La nouvelle Turquie est en quelque sorte le résultat des mesures politiques et économiques adoptées depuis dix ans par le Premier ministre (...)
Alain Juppé, en visite en Turquie ce jeudi, tente de renforcer les relations franco-turques. Mais après avoir été tournée vers l’Europe, la diplomatie du pays dirigé par Erdogan semble changer de cap...
Quelle est actuellement la diplomatie turque ? Se déploie-t-elle vers l’Union Européenne ou le Moyen-Orient ?
Ahmet Insel * : Actuellement il est difficile de définir la stratégie de la Turquie. Son ambition européenne ne dépend pas exclusivement de la volonté du gouvernement turc. Il existe aussi un (...)
Atlantico : Dans une interview publiée dimanche, le Président turc Abdullah Gül estime qu’Ankara pourrait devenir le « moteur de croissance » de l’Union Européenne. L’intégration de la Turquie à l’Europe pourrait-elle sauver la croissance européenne ?
Ahmet Insel : Il est difficile de faire ce pronostic, puisque la croissance turque est fortement liée à la croissance européenne. Une partie importante de ses exportations est en effet destinée à l’Europe, et la crise économique actuelle va indéniablement (...)
Il n’y a pas aujourd’hui en Turquie de projet politique et social plus fou qu’une proposition concrète et réaliste en vue d’une solution à la question kurde.
Pourquoi ne pas faire de la question kurde notre projet fou ? Non pas dans dix ans, mais juste là, au lendemain des élections du 12 juin prochain, un projet de solution à cette question pour tout de suite, n’est-ce pas un projet suffisamment fou, eu égard à la situation présente ?
Peut-être qu’il ne ravira pas les entrepreneurs, le secteur du (...)
Le problème provient-il de ce que l’AKP est au pouvoir depuis 8 ans ? De ce que ce parti connaît une bien naturelle érosion du pouvoir, une fatigue ? Ou alors est-il lié au fait que n’ait toujours pas émergé une opposition crédible et capable de le menacer malgré huit ans aux responsabilités ? Ou alors serait-ce que, gagné par la confiance, le petit groupe des dirigeants de l’AKP, laisserait ressortir de façon plus évidente ses réflexes, ses manières de faire et sa vision du monde, trop longtemps refoulés (...)
L’AKP, Parti de la justice et du développement, au pouvoir depuis 2002 et issu de la mouvance islamiste turque a fait l’objet d’un schéma critique fondé sur son « essence » supposée. C’est aujourd’hui une structure critique analogue qui est appliquée au principal parti d’opposition, le CHP (Parti républicain du peuple, ancien parti unique et membre de l’Internationale socialiste), en proie, depuis le printemps dernier, à des secousses remettant en cause son positionnement conservateur et souverainiste. (...)
Une partie de ceux qui prétendaient qu’en Turquie la laïcité était menacée et qu’on se dirigeait vers la fondation d’un Etat islamique ont modifié leur cote d’alerte lors du référendum du 12 septembre dernier. Les huit années d’administration AKP commencent à rendre inopérante cette hallucination du « prenez garde, ils arrivent avec des drapeaux verts ». En lieu et place de ce fantasme, émerge une autre comparaison pour rendre compte du danger que certains tentent de pointer en parlant de dictature ou de (...)
58 % des électeurs turcs ont approuvé par référendum, dimanche dernier, un paquet de réformes constitutionnelles : c’est une large et sereine décision de la société turque.
On peut parler d’acceptation sereine parce que ce vote n’est pas tout à fait un plébiscite en faveur du parti au pouvoir, l’AKP (parti de la Justice et du Développement, islamo-conservateur), mais relève plutôt d’un délicat mélange de soutien aux réformes et de confiance accordée à ce parti. Elle est l’expression nette d’une demande de (...)
La question kurde n’est pas une question de terrorisme. Et cela pour deux raisons.
La première est que l’on ne reconnaît pas aux gens le droit de vivre en citoyen de Turquie avec une identité kurde. En Turquie, les citoyens d’origine kurde ne sont les victimes d’aucune discrimination pour autant qu’ils acceptent de se turquifier, mais cela ne signifie pas la reconnaissance d’une identité kurde. Et il est donc une question kurde dans ce pays parce que n’existe pas toute une série de droits (...)
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