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TURQUIE - Porter le voile est-il un droit de l’homme ?

jeudi 26 mai 2005, par Rusen Cakir

Courrier International

Le voile islamique est toujours interdit dans les universités turques. Et personne en Occident ne juge que cette interdiction est contraire aux droits de l’homme, souligne Vatan.
La question de l’interdiction du port du voile, qui est à nouveau à la une de l’actualité en Turquie, ne semble pas éveiller beaucoup d’intérêt à l’extérieur de nos frontières. Hormis au sein de quelques groupes islamistes qui utilisent cette problématique à des fins de propagande, on ne peut pas vraiment dire que les jeunes filles turques qui ne peuvent aller à l’université pour cause d’interdiction du port du voile bénéficient d’une quelconque sympathie sur le plan international. En tant que journaliste, j’ai été amené à répondre régulièrement à toutes sortes de sollicitations émanant de personnes issues de la diplomatie, du monde de la recherche et du journalisme, le plus souvent des Occidentaux.

“Réformer l’islam malgré les musulmans”

J’ai ainsi pu constater que la grande majorité d’entre eux, bien qu’ils s’intéressent pourtant au moindre détail de ce qui concerne les mouvements islamiques en Turquie, ne portent pas à la question du voile l’intérêt qu’elle mérite. Ces personnes, qui peuvent faire preuve d’une grande ouverture d’esprit à l’égard de l’islam, n’éprouvent pas la moindre empathie à l’égard des victimes de l’interdiction du port du voile. Elles sont même plutôt méfiantes. L’interdiction du port du voile n’est pas considérée en Occident comme une question de droits de l’homme liée à la liberté de conscience et de religion, mais comme un problème relevant de la politique intérieure. Il est d’ailleurs assez révélateur de constater que le sujet n’est même pas repris - ou à peine - dans les rapports sur la situation des droits de l’homme en Turquie publiés en Europe et aux Etats-Unis. Cette interdiction ne trouve pas davantage d’écho dans la culture populaire occidentale, alors qu’en revanche les récits de femmes obligées de se voiler ou luttant contre le port du voile y deviennent vite des best-sellers.
Il y a aujourd’hui en Occident un quasi-consensus sur le fait que la question de la femme est au centre du débat que vit actuellement le monde musulman. Dans ces conditions, l’idée que le port du voile puisse être autorisé dans les universités turques, avec pour conséquence qu’il se généralise, alimente la crainte selon laquelle la Turquie pourrait se couper du monde occidental. Et, contrairement à ce qu’affirment certains militants de la cause laïque en Turquie, la stratégie américaine visant à favoriser l’islam “modéré” - pour laquelle les Etats-Unis ont débloqué des millions de dollars - n’a jamais été conçue pour soutenir la cause du voile en Turquie. En effet, cette stratégie vise à “réformer l’islam malgré les musulmans”.
Depuis sa création, l’AKP [parti islamiste au pouvoir] avait pourtant pris bien soin de ne pas mettre à l’ordre du jour l’interdiction du port du voile. Les victimes de cet interdit ont donc patienté sans amorcer la moindre action, sans lancer la moindre pétition, pour finalement sombrer dans le désespoir.

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