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Turquie : mettre un terme au bal des vampires

lundi 15 septembre 2008, par Hasan Cemal, Mehmet Akkus

Chez nous, la danse des revenants ne finit jamais. Une nuit, ils vont sortir de leur cimetière de zombis pour nous dévorer tout cru.

Ainsi vont nos peurs.
Elles sont en permanence après nous.
Les islamistes installeront un régime religieux.
Les Kurdes diviseront le pays !
Les Arméniens achèteront nos terres !
Voici ces vieilles peurs, qui encore aujourd’hui, continuent à nous poursuivre.

Notre confiance en nous-mêmes est malheureusement très limitée.
Nos vieux démons nous empêchent d’affronter et de résoudre toutes ces peurs qui depuis des décennies resurgissent régulièrement :
La question de l’Islam……
La question kurde……..
La question arménienne…….
Et même la question chypriote…….

Notre incapacité à résoudre ces questions n’a fait qu’accroître nos peurs, et plus elles se sont accrues, plus les ennemis de la démocratie les ont exploitées.
Ce sont ces mêmes inconditionnels de la littérature « zombie » qui veulent empêcher le développement de la démocratie et qui pensent que la Turquie ne mérite pas d’être un état de droit et de justice digne de ce nom.

En condamnant les voies de la démocratie et de la justice, du bien être du citoyen, nous faisons beaucoup de mal à la Turquie.

Les zombis !

J’ai emprunté ce terme de zombi à Monsieur Baskin Oran, qui actuellement, écrit une série d’articles sur la question arménienne dans le journal Radikal. (*)

Dans un de ses passages, le professeur Oran écrit : « L’état Ottoman et l’état turc, n’ont à aucun moment, cherché à résoudre adroitement les grandes questions. Les massacres des Arméniens de 1915 et d’après 1915, la question de l’Islam depuis 1924, la question Kurde depuis 1925, la question Chypriote depuis 1950…

Nous les Turques, nous avons une sale habitude qui est de laisser pourrir la situation. Tout ce que nous avons balayé sous le tapis commence à sentir mauvais et tous les cadavres que nous avons mis dans les placards ressortent en masse.
Notre volonté d’intégration à l’Union Européenne nous oblige maintenant à faire face à nos problèmes, les uns après les autres. Si nous refusons d’affronter ces problèmes, il nous sera impossible de prétendre à devenir un jour Européen.
Cependant, nous avons une peur mortelle de les affronter. Il y au moins trois zombis qui nous en empêchent….
 » Le professeur Baskin ajoute : « serons-nous capable un jour d’affronter les grands problèmes et de les résoudre ? »

Le livre que j’ai lu pendant mes vacances, n’était pas optimiste à ce sujet (**). Il disait que la Turquie était à la croisée des chemins et que ce n’est pas l’AKP qui ferait le choix de la bonne voie à suivre.

L’auteur du livre, Hamit Bozarslan, après avoir dit que la Turquie était loin de faire le changement radical de régime qu’ont fait l’Espagne, le Portugal et la Grèce dans années 70, ajoute : « Mon professeur de thèse, François Furet, disait : un pays qui refuse de s’interroger ne peut intégrer le concert des pays civilisés. La Turquie qui n’arrive pas à sortir du syndrome de la tour attaquée de l’extérieur et de l’intérieur par des « ennemis éternels », risque encore de rester longtemps éloigné de ce monde civilisé. »

Est-ce du réalisme, du pessimisme ? Je ne sais pas. En tout cas, Pour que la Turquie puisse un jour intégrer le monde civilisé, elle devra d’une part se débarrasser de ses zombis, c’est-à-dire affronter ses problèmes et d’autre part, avancer avec détermination dans la voie de l’intégration Européenne.

C’est une question de vie et de mort non seulement pour la Turquie, mais aussi pour Erdogan et l’AKP.
Voici les pensées qui m’ont traversées l’esprit, avant d’aller assister à la rencontre Arménie-Turquie à Erevan, demain.

Un dernier mot : j’espère que cette rencontre permettra une normalisation des relations entre ces deux pays.

— -
* Baskın Oran ; La diaspora Arménienne : Où sommes-nous après Hrant ? Radikal, 17-20 août 08.

** Hamit Bozarslan, L’histoire moderne de la Turquie, aux éditions Avesta, 2008.

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Sources

Source : Milliyet, septembre 2008

- Traduction pour TE : Mehmet Akkus

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