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La Turquie, petite Chine de l’Europe

mardi 2 novembre 2010, par Jean-Marc VITTORI

L’Europe a une petite Chine à ses portes. De la mi-2009 à la mi-2010, la Turquie a fait bondir sa production de plus de 10 %, la plus forte progression mondiale derrière l’empire du Milieu.

Elle est sortie plus tôt de la crise que les autres, une crise qui l’a à peine effleurée. Son marché intérieur sera bientôt plus peuplé que l’Allemagne, le plus peuplé des pays de l’Union européenne. Son niveau de vie, le tiers de celui de l’Union, est en plein boom. En moins d’une décennie, les revenus ont bondi de moitié. Si l’Europe reste de loin son premier client, ses exportateurs sont partis chercher des acheteurs en Asie, au Maghreb, au Proche-Orient et en Afrique pour compenser la déprime du Vieux Continent. La dette publique a été ramenée, en moins d’une décennie, de 75 % du PIB à moins de 40 %. Les pressions inflationnistes sont toujours là, mais la banque centrale les tient sous son joug. Les échanges sont déficitaires, mais le pays finance ce déficit en rapatriant ses capitaux et en attirant les investisseurs par des perspectives prometteuses. Les dirigeants ont tiré les leçons de la crise financière qui a balayé le pays il y a une décennie. Et sa démocratie semble devenir plus solide.

Pendant des années, seule la géopolitique motivait les attentions portées par l’Europe à la Turquie - et les efforts de Washington pour préserver des liens étroits avec Ankara, malgré ses relations devenues compliquées avec Tel-Aviv. Le pays est la porte naturelle du continent vers l’Orient. Difficile d’envisager d’avancer avec l’Iran, sur le dossier Israël-Palestine, dans la sécurité énergétique avec les immenses gisements de la Russie ou du Kazakhstan, voire sur les relations entre la chrétienté et l’islam, sans passer par les rives du Bosphore. Mais, aujourd’hui, la Turquie n’est plus seulement un enjeu politique. Elle devient aussi un enjeu économique. Tôt ou tard, les Européens vont devoir en prendre conscience.

Nicolas Sarkozy a toujours affiché son opposition à l’entrée de la Turquie dans l’UE, demandée il y a plus de vingt ans. Il a ramassé sa position dans une formule choc : « La Turquie est avec l’Europe et elle n’a pas vocation à être dans l’Union. » Hier, il prenait un risque diplomatique. Demain, il prendra aussi un risque économique, celui de fermer la porte au pays le plus dynamique de la région. Il est encore temps d’imaginer un partenariat satisfaisant les deux parties. Ou sinon de trouver les moyens d’intégrer dans l’Union la république laïque que demeure la Turquie. Nicolas Sarkozy n’a pas été élu pour ça. Mais l’enjeu est encore plus important que le maintien du bouclier fiscal, autre objet de la fermeté présidentielle, pourtant devenu passoire en trois mois.

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Sources

Source : Les Echos du 27/10/10

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