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Turquie : les agriculteurs de l’Est victimes d’une sécheresse persistante

vendredi 22 août 2008, par Anne Guezengar, Ismail Kocabiyik

La région du Sud-est anatolien, qui fournit une bonne part de la production agricole du pays est victime ces dernières années d’une sécheresse entrainant une baisse de la production agricole du pays.

Selon des études récentes, en 2008, la Turquie devrait subir une baisse de 20% de sa production de blé et de 30% de celle d’orge à cause de la sécheresse qui frappe le Sud-est anatolien.

Une baisse de la production agricole due à une sécheresse persistante.

Semsi Bayraktar, le président de la Chambre d’agriculture de Turquie (TZOB) a indiqué dans un entretien accordé à Today’s Zaman, que la baisse des précipitations entre octobre 2007 et mai 2008 était de 15% pour l’ensemble du pays, et qu’elle atteignait 44% dans le Sud-est. Selon lui, dans cette région, la production de blé pour l’année 2008 devrait chuter de moitié.

Ce déficit de précipitations n’étant pas circonscrit à la région du Sud-est, c’est à l’échelle du pays qu’elles seront insuffisantes pour permettre de bonnes récoltes. Mais c’est là que la situation est plus alarmante. Des enquêtes à l’échelle régionale conduites par la Chambre d’agriculture, concluent que dans les départements de Gaziantep, Urfa, Mardin, Diyarbakir, Batman, Hakkari, Muş, Siirt, Şırnak et Elazıg, la production de céréales a chuté de 90% par rapport à la production annuelle moyenne. La chute de la production de lentilles a été, quant à elle, de 60%.

Le Sud-est produit 13% de la production de blé, 16% de celle d’orge et 86% de la production de lentilles du pays. Cette année la Turquie produira 2,5 millions de tonnes de blé et 1,6 million de tonnes d’orge de moins qu’en moyenne. Quant à la production de lentilles, de 340 000 tonnes, elle devrait se réduire à 250 000 tonnes.

Des agriculteurs pris à la gorge

« Le gouvernement fournit les semences, mais les agriculteurs n’ont pas un sou pour les semer » déplore Halil Dolap, le président de la Chambre d’agriculture d’Urfa. Il pense que le projet de développement du Sud-est anatolien (GAP) que le gouvernement a décidé de relancer doit prendre en considération le contexte agricole de toute la région du Sud-est.
« Ce doit être un plan d’action national, de la même façon que la lutte contre le PKK. La coopération est indispensable pour résoudre nos problèmes ». Selon lui, les avancées faites par le gouvernement AKP en direction de la région sont importantes, mais elles restent insuffisantes. Ainsi, si les remboursements des emprunts contractés par les agriculteurs auprès des banques publiques ont été suspendus, ils sont nombreux à s’être endettés auprès de banques privées bien moins enclines à ajourner les remboursements.

Les éleveurs de l’Est, victimes de la flambée des cours de l’orge.

Ismail Kemaloglu, le président de l’Office de la production agricole (TMO) s’attend à ce que la production d’orge ne soit que de 6 millions de tonnes cette année en Turquie, au lieu de 8 à 9 millions de tonnes en moyenne pendant les dix dernières années, ce qui devrait obliger le pays à recourir à l’importation.

Cette chute de la production d’orge a entraîné une flambée des prix. Ils ont doublé, passant de 30Ykr à 60 Ykr (de 16 à 32 cents environ) le kilo. Les éleveurs de bovins et de moutons de la région lancent un cri d’alarme ; si les prix continuent sur cette lancée, ils ne seront plus en mesure de nourrir leurs troupeaux l’hiver prochain. L’élevage représentant une part importante du revenu des agriculteurs du Sud-est, cette flambée du prix de l’orge a des conséquences dramatiques.

Un plan de soutien aux agriculteurs ?

Compte tenu de la sécheresse qui sévit en Anatolie centrale et orientale, Semsi Bayraktar s’attend à ce que la baisse de la production de blé en Turquie atteigne 20%. « Les prix des fertilisants ont grimpé de 150%, ceux du diesel de 30% ce qui entraîne une hausse des coûts de production. Produire un kilo de blé coûte désormais 61Ykr à l’agriculteur. Nous voudrions que le TMO fixe un prix plafond pour ces entrants agricoles de base ». Aggravant encore la situation, le prix d’achat du blé au producteur a au contraire subi une baisse d’un peu plus de 50 Ykr le kilo. Le pire est qu’une chute des cours est attendue avant même que les récoltes ne commencent, ce qui signifie des pertes conséquentes pour les agriculteurs.

Il pense que tout le monde devrait se souvenir des leçons de la sécheresse de 2007 et que le gouvernement devrait mettre en place des moyens pour compenser les pertes des agriculteurs. « Le gouvernement doit évaluer celles qu’ils vont subir et agir rapidement pour couvrir suffisamment ces pertes et qu’ils puissent survivre. Et il ne doit y avoir aucune discrimination selon les régions ou les productions. »

La baisse de la production de blé en Turquie comme dans le monde entier devrait entraîner une augmentation des prix cette année et celles à venir. Personne ne pense que la Turquie risque d’être confrontée à une pénurie alimentaire, au moins en 2008. Néanmoins la spéculation risque d’entraîner une augmentation des prix plus importante que prévu. Semsi Bayraktar estime donc que le TMO devrait mettre en place une politique pour défendre producteurs et consommateurs.

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Sources

Source : Today’s Zaman
, le 22 juin 2008

Traduction et adaptation pour TE : Anne Guezengar.

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