Le centre pénitencier dans lequel est détenue l’Agenaise Sabah Ezzedi est à l’opposé des clichés sur les prisons turques.
Maître Laurent Bruneau, le défenseur de Sabah Ezzedi, n’en est toujours pas revenu. Au lendemain de son retour de Turquie, où il s’était rendu pour plaider la cause de la serveuse agenaise accusée de trafic de drogue, l’avocat agenais a découvert des conditions de détention qu’il qualifie d’« hallucinantes », en comparaison à celles des prisons françaises.
Très loin des clichés véhiculés depuis le film cauchemardesque d’Alan Parker, l’incontournable « Midnight Express ».
Détenue dans un loft
Ici, pas question bien sûr de minimiser l’épreuve endurée par Sabah Ezzedi, qui souffre surtout de l’éloignement et de l’absence de sa famille. Et même si de telles conditions de détention semblent exceptionnelles, elles ne pourraient faire oublier à un innocent (c’est ce qu’elle clame être) sa privation de liberté.
Cependant, à l’heure où le Sénat adoptait le projet de loi pénitentiaire intégrant l’« encellulement » individuel, voici à quoi ressemble une prison moderne en Turquie, selon Me Bruneau : « Sabah est détenue dans un loft abritant 25 femmes au total. Et chacune d’entre elles a le choix entre des chambres doubles ou individuelles. Sabah, par exemple, partage sa chambre avec une détenue de nationalité russe. Le loft possède en outre un coin TV et une cuisine américaine. Par ailleurs, une crèche intégrée à la prison permet aux mères de famille de confier leurs enfants à du personnel extérieur au centre de détention. »
« Il y a un coin TV, une cuisine américaine et même une crèche intégrée à la prison »
« Au sein de la prison, sont également organisées des formations, poursuit l’avocat. Sabah a ainsi suivi des leçons de coiffure, prend des cours de russe, d’anglais et de turc. Il est même proposé des balades à la campagne encadrées par l’armée », détaille Laurent Bruneau, qui ne veut pas tomber dans un angélisme béat.
Rappelons à ce propos que la famille Ezzedi doit faire parvenir quelque 200 euros par semaine à Sabah, puisque tout se paie dans sa prison.
Capteurs biométriques
« Je ne suis pas convaincu, ajoute Me Bruneau, que ce genre de prison existe au cœur de l’Anatolie. En outre, il faut tout de même dire qu’il ne s’agit pas là d’un camp de vacances. L’administration pénitentiaire est très rigoureuse et s’est approprié les nouvelles technologies. Pour preuve, des capteurs biométriques qui se focalisent sur les prunelles des yeux commandent l’ouverture des portes.
Faut-il préciser également qu’en Turquie, il n’existe pas d’aménagement de peine.
On purge donc sa peine jusqu’au bout. Seulement voilà, les délinquantes et les criminelles détenues dans la prison de Sabah sont condamnées à une seule chose : la privation de liberté. Leur dignité est sauve. »
Et l’avocat d’assurer : « Quand je suis arrivé en Turquie, j’étais fier de la décision des sénateurs. Mais quand je suis reparti, eu égard à ce que j’ai vu, je me suis dit que la France avait cinquante ans de retard sur le sujet des prisons. » De quoi effectivement faire réfléchir les responsables politiques français en la matière, qui se targuaient, il n’y a pas si longtemps, d’avoir inauguré une prison ultramoderne à Mont-de-Marsan.
Cette même prison dont on dut évacuer les détenus cet hiver pour une panne de chauffage…