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La Turquie : trop tard pour investir ?

jeudi 17 septembre 2009, par Béatrice Denis

Béatrice Denis

Les fonds d’actions turques, au coude à coude avec les fonds d’actions russes et brésiliennes, font partie du trio de tête des fonds les plus performants depuis janvier. Interview d’Eli Koen, gérant du fonds d’actions turques N°1 de sa catégorie.

Cash : Comment la Turquie a-t-elle vécu la crise ?

E. Koen : En termes économiques, la Turquie a été l’un des pays les plus touchés par la crise. Son produit intérieur brut (PIB) s’est même contracté d’environ 13 % ce premier trimestre, l’une des contractions de PIB les plus fortes de son histoire. La situation ne devrait s’améliorer que très progressivement en raison de l’effondrement de la consommation, lié au taux de chômage élevé, et de la faiblesse des exportations vers l’Europe, partenaire clé qui lui aussi est affecté par la crise. Cela dit, la Turquie n’a pas souffert d’une crise financière : son système bancaire est l’un des plus robustes au monde, notamment en termes de capitalisation, et ses banques n’étaient pas exposées aux actifs « toxiques ». Cette situation est l’inverse de 2001 où la survie du système bancaire turc fut mise en doute. Elle lui a permis de mieux faire face à la situation et si la Bourse turque est parmi celles qui ont été les plus touchées en 2008, elle est aussi l’une des plus performantes actuellement avec un gain d’environ 80 % en EUR depuis janvier.

Cash : Quels facteurs clés devraient influencer sa trajectoire à moyen terme ?

E. Koen : Contrairement aux pays asiatiques par exemple, la Turquie n’est pas un pays d’exportation. Son modèle de croissance s’apparente davantage à celui des pays d’Europe de l’Est car il repose sur le développement de la consommation intérieure. Or, celle-ci est en panne en raison de la crise et vu le taux d’épargne peu élevé en Turquie, elle dépend des flux de capitaux étrangers, tels que le crédit et l’investissement étranger direct, qui se sont taris avec la récession. Actuellement, la Bourse s’est redressée en anticipation d’une reprise de ces flux dans les six mois. Dans les faits, elle ne s’est pas encore matérialisée : tout au plus remarque-t-on un ralentissement de la détérioration. Il sera important de surveiller les signes d’amélioration effective des investissements étrangers.

Un autre facteur clé qui, lui, est davantage considéré comme un risque historique, est l’aspect politique. Il n’y a guère eu de remous politiques ces douze derniers mois, mais cela risque de changer. Des élections générales sont prévues pour 2011 et la campagne devrait débuter en 2010.

Cash : Après la forte poussée de ce premier semestre, les actions turques sont-elles encore une bonne affaire ?

E. Koen : Les ratios cours/bénéfices 2009 et valeur d’entreprise/EBITDA s’élèvent respectivement à environ 11 et 6,5. Si l’on procède à une analyse des titres individuels selon la méthode discount cash flow, on observe toutefois de nettes divergences selon les capitalisations boursières et les secteurs. Les large-caps évoluent à des niveaux de valorisation corrects ou avec une légère prime, tandis que les small- et mid-caps évoluent entre des niveaux corrects à trop bas. Les investisseurs à l’affût de gains faciles et rapides risquent d’être déçus (NDLR : à moins de profiter d’un repli intermédiaire de court terme) – des valorisations telles qu’on en voyait encore en janvier avec des actions bancaires s’échangeant sous leur valeur comptable sont plus rares. La Turquie étant un marché très volatil, il est d’ailleurs périlleux d’essayer de déterminer avec précision le timing idéal pour s’y positionner. En revanche, les niveaux de valorisation actuels demeurent attractifs pour les investisseurs disposant d’un horizon de moyen/long terme.

Cash : Sous quel angle envisager l’achat d’un fonds d’actions turques ?

E. Koen : L’argument est le même que pour les pays émergents en général : un fonds d’actions turques peut intégrer un portefeuille bien diversifié afin d’en rehausser le potentiel de croissance, le rythme d’expansion de ces pays étant supérieur à celui des régions industrialisées. Investir en Turquie recèle deux avantages en particulier. La Turquie est l’un des marchés les moins chers parmi les pays émergents, car elle est considérée comme plus risquée. Toutefois, la crise a démontré que ce n’est pas vraiment le cas et à terme, cette décote devrait s’amenuiser. En outre, la convergence économique progressive de la Turquie avec l’Union européenne laisse entrevoir des opportunités. La Turquie a déjà pris d’importantes mesures en ce sens : normalisation des taux d’intérêt, inflation, déficit budgétaire, etc. Même s’il s’agit surtout d’intégration économique et non politique (ce dernier aspect relève davantage du très long terme), investir en Turquie apparaît comme une proposition alléchante quand on voit que ce processus a fortement soutenu les Bourses polonaises, tchèques, etc., plusieurs années après leur intégration.

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Sources

Source : Trends-Cash (Belgique), le 10.09.09

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