Fin juin, la France devra dire si elle autorise l’ouverture de trois nouveaux chapitres de négociation entre la Turquie et l’Union européenne.
Le Parlement turc a adopté mardi une loi déterminant le cadre légal pour la construction et la mise en service des premières centrales nucléaires du pays. Le texte autorise le ministère de l’énergie à lancer un appel d’offres pour la construction des centrales et détermine quelles seront leurs capacités et où elles seront construites. Le gouvernement turc prévoit de construire trois centrales nucléaires, d’une capacité totale de 5 000 mégawatts, qui devraient être opérationnelles en 2012.
Cette avancée est importante pour Areva, le champion français du nucléaire, qui espère décrocher un contrat de construction en Turquie, et elle symbolise les choix qui vont se poser assez vite à Nicolas Sarkozy quant à sa position vis-à-vis de l’adhésion de ce pays à l’Union européenne. Si le nouveau président s’obstine à vouloir enrayer ce processus, les autorités turques ont clairement fait savoir que les entreprises françaises en subiraient les conséquences.
« On perd déjà des marchés, soupire un diplomate français de haut rang en poste à Ankara. Pourtant, personne en France ne semble prendre la mesure des enjeux. La France s’éloigne de la Turquie au moment où celle-ci émerge économiquement. »
La Turquie est le 12e partenaire commercial de l’Hexagone, le volume des échanges équivalant celui avec le Japon. La France est aujourd’hui le cinquième investisseur dans le pays, après avoir été parmi les trois premiers. L’hostilité de Paris à la candidature turque affichée depuis deux ans et l’adoption par l’Assemblée nationale d’une loi pénalisant la négation du génocide arménien ont déjà très certainement fait perdre des contrats à des entreprises françaises d’armement. Il y a un mois, Ankara a laissé entendre que Gaz de France serait exclu d’un projet de gazoduc entre la Turquie et l’Autriche, sans que cela soit confirmé. « Si le Sénat examine à son tour la loi sur le génocide, il n’y a plus qu’à fermer l’ambassade », soupire le même diplomate.
Nicolas Sarkozy devra définir sa politique d’ici au 26 juin. Ce jour-là, les ministres des affaires étrangères des 27 pays de l’Union devront décider s’ils autorisent la Commission à ouvrir trois nouveaux chapitres de négociation avec la Turquie. La France, si elle oppose son veto, n’aura pas le soutien de l’Allemagne, malgré l’opposition de la chancelière Angela Merkel à l’adhésion de la Turquie. Celle-ci applique en effet le « contrat de coalition » qu’elle a signé il y a un an et demi avec le Parti social-démocrate (SPD). Or, cet accord prévoit la poursuite des négociations avec la Turquie.