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Turquie - UE : un couple en union libre

mardi 13 novembre 2007, par Marie-Antide

La Commission européenne a publié le 6 Novembre son rapport annuel d’élargissement aux pays candidats dont la Turquie.

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Elle applaudit « la démocratie [qui] s’est imposée lors d’une crise dans les relations entre autorités civiles et militaires », souligne le dynamisme de l’activité économique (ndlr : fortement dépendante des capitaux étrangers) mais pointe « les avancées […] limitées sur le plan des réformes politiques en 2007 ».

La Commission demande à la Turquie des « efforts considérables » en matière de libertés d’expression, de droits des communautés religieuses non musulmanes, de droits de femmes et des mineurs et sur la surveillance civile des forces de sécurité.

Le ton adopté pour ce rapport est nuancé mais ferme et tranche avec les deux années précédentes où Bruxelles faisait preuve de compréhension face à l’échéance d’élections qui s’annonçaient délicates pour le premier ministre Recep Tayip Erdogan.

En ligne de mire de la Commission le malheureusement fameux article 301 du code pénal qui sanctionne de 6 mois à 3 ans de prison "quiconque humilie ouvertement le gouvernement, les organes de justice de l’Etat, les structures militaire ou policière ».

Pour le commissaire à l’Elargissement Ollie Rehn, « il n’est pas acceptable dans une démocratie européenne que des écrivains, des journalistes, des universitaires et d’autres intellectuels (…) soient poursuivis pour simplement avoir exprimé une opinion critique mais totalement non violente ».

Le dernier exemple en date est la condamnation à un an de prison avec sursis d’Arat Dink, fils de Hrant Dink, rédacteur en chef du journal turco-arménien assassiné début 2007 pour avoir publié un article de son père qualifiant de génocide le massacre des arméniens en 1915-1917.

Un rapport largement commenté en Turquie

Le journal de centre gauche « Radikal » titrait « Le chemin vers l’Europe passe par le 301 » alors que Sabah présentait à ses lecteurs le large écho donné au rapport dans les presses anglaises (FT, Guardian, The Independent), espagnoles (El Pais, El Mundo), françaises (Le Figaro), allemandes (Die Welt) ou arabophones (Al Jazeera).

Le gouvernement a rapidement réagi. Le Ministre des Affaires étrangères, Ali Babacan, a souligné dans un communiqué que « la détermination à remédier aux insuffisances et à appliquer efficacement les réformes sur le terrain ne baisse pas, au contraire, elle s’accroît ».

Le ministre de la Justice, Mehmet Ali Sahin a lui déclaré que l’article 301 serait examiné « à la première occasion » par le Conseil des Ministres pour être amender. Le 3 Octobre, le président de la République, Abdullah Gül s’était prononcé en faveur d’un tel amendement … comme Recep Tayip Erdogan en 2006.

Le poids de la crise kurdo-irakienne

Ce rapport, les déclarations de bonnes intentions des dirigeants turcs, les encouragements des instances européennes ne doivent toutefois pas faire oublier que l’intégration de la Turquie à l’Union Européenne est une équation à inconnues multiples qui nécessite deux parties pour obtenir des résultats.

- D’une part, la volonté politique de l’Union européenne à vouloir intégrer la Turquie en son sein. La première phrase du rapport est la suivante « les négociations d’adhésion avec la Turquie ont été engagées le 3 Octobre 2005 et suivent leur cours » et la Commission a appelé l’UE à respecter les engagements pris. Ollie Rehn, au cours de sa conférence, s’est exceptionnellement exprimé en français. Il n’est pas besoin d’être très clairvoyant pour y voir un évident message à la ligne politique de Nicolas Sarkozy et son partenariat privilégié.

- D’autre part, la volonté politique du gouvernement turc. Elu en Juillet dernier, le gouvernement de Recep Tayip Erdogan n’a pas montré de diligence particulière pour les réformes en vue de l’intégration, leur préférant la réforme de la Constitution héritée du coup d’Etat militaire de 1982. Et la crise kurdo-irakienne avec laquelle il se débat depuis quelques semaines n’a certainement pas favorisé le retour des questions européennes dans son agenda.

La réalité est que le processus d’élargissement dans son ensemble marque le pas : comme aux autres candidats, l’UE n’est pas capable de dire à la Turquie « sous réserve du respect de vos engagements, l’UE vous intégrera telle année ».

Ce flottement nuit à la dynamique que les partisans turcs de l’intégration tentent de maintenir. A ce jour, seul le chapitre « Science et Recherche » a été clôturé. La Commission est favorable à l’ouverture des chapitres sur la protection des consommateurs, les réseaux de transport et bien sûr, celui de l’énergie, compte tenu de la position centrale de la Turquie dans la distribution du gaz en Europe.

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