Neuf morts, tous Turcs. L’Allemagne s’interroge sur les causes de l’incendie meurtrier qui a ravagé, dimanche 3 février, un immeuble de Ludwigshafen, en Rhénanie-Palatinat, sur le Rhin. Acte xénophobe, simple accident ? Le parquet de la ville a indiqué n’exclure aucune piste et a décidé d’ouvrir une enquête.
La police a déjà auditionné deux fillettes, présentes sur les lieux au moment du drame. D’après leur témoignage, un homme parlant allemand aurait mis le feu à un landau dans la cage d’escalier de cet immeuble, où vivent plusieurs familles turques. Les flammes ont tué cinq enfants et quatre adultes, et fait une soixantaine de blessés.
Les autorités turques ont exigé que toute la lumière soit faite. Ankara a dépêché ses propres agents chargés de participer aux travaux des enquêteurs allemands. Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, en visite à Berlin vendredi 8, a décidé de se rendre, jeudi sur les lieux de l’accident. « Nous ne voulons pas vivre un deuxième Solingen », a-t-il prévenu. En 1993, trois fillettes et deux jeunes femmes turques avaient trouvé la mort dans l’incendie de leur maison à Solingen, près de Cologne. Les auteurs du sinistre étaient quatre jeunes néonazis. Trois ans après la réunification allemande, la tragédie, qui survenait après une série d’attaques xénophobes dans l’ancienne Allemagne de l’Est, a laissé de profondes traces chez les Turcs d’Allemagne, la plus importante communauté immigrée outre-Rhin.
L’envoi de policiers turcs a été plutôt bien accueilli par les autorités allemandes. Mais le drame provoque quelques remous entre Berlin et Ankara. L’ambassadeur de Turquie en Allemagne s’est étonné que le ministre- président de Rhénanie-Palatinat, Kurt Beck, par ailleurs président du Parti social-démocrate, ait d’emblée exclu, en visitant les lieux lundi, l’hypothèse d’un crime raciste.
Berlin appelle les représentants de la communauté turque à la retenue tant que l’enquête est en cours. Le ministre de l’intérieur, Wolfgang Schäuble, en visite mardi à Istanbul, s’est agacé des gros titres de la presse turque qui relaie la thèse de l’incendie volontaire. « C’est de la discrimination contre les Allemands », a-t-il protesté.