Logo de Turquie Européenne
Accueil > Articles > Articles 2009 > 04 - Quatrième trimestre 2009 > L’archéologie française en Turquie : Entretien avec Aksel Tibet

L’archéologie française en Turquie : Entretien avec Aksel Tibet

mercredi 18 novembre 2009, par Juliette Dumas

Archéologue de formation, Aksel Tibet a participé et dirigé plusieurs campagnes de fouilles archéologiques en Turquie, notamment sur les sites de Horum Höyük (Gaziantep) et Zeyve Höyük (Porsuk), derniers en date. Après avoir été secrétaire général de la section stambouliote de l’Association des archéologues turcs pendant neuf ans, il est actuellement en charge des publications de l’Institut Français d’Etudes Anatoliennes (IFEA). Il a également pris part à la réalisation des deux événements majeurs que sont la Saison de la Turquie en France (on lui doit notamment la réunion et l’envoi de tous les objets présentés au Grand Palais, à l’occasion de l’exposition « De Byzance à Istanbul : un port pour deux continents ») et Istanbul, capitale européenne de la culture en 2010, dont il a été un des membres de la Commission consultative du département des projets urbains de l’Agence Istanbul 2010. Dans son bureau, au premier étage du bâtiment de l’IFEA, dans l’enceinte du Palais de France, il a répondu à nos questions concernant l’archéologie française en Turquie.

La Turquie est un pays riche en civilisations, et qui a conservé de nombreux héritages de son passé. Avant de rentrer dans le détail de l’archéologie française en Turquie, pourrais-tu nous dresser un rapide tableau de l’archéologie en Turquie ?

Faisons un petit rappel historique. L’archéologie « turque », ou l’archéologie en Turquie, remonte à l’époque ottomane, contrairement a ce que l’on a pu dire. Il existait bien un point de vue orientaliste, prétendant que les Ottomans ne faisaient pas cas des pierres anciennes qui pullulaient dans leurs territoires. C’était peut-être vrai jusqu’au 19e siècle, mais ensuite, il y a eu une volonté de se tourner vers le passé, vers les civilisations passées qui ont existé sur les territoires ottomans. Notamment, un homme est à l’origine de tout cela : Osman Hamdi Bey, qui fut un érudit ottoman, de très bonne famille, à la fois peintre orientaliste et archéologue. Il s’intéressa en effet beaucoup à l’archéologie, et avait d’ailleurs beaucoup de relations avec les archéologues européens de son temps, notamment français, et c’est lui qui initia les premiers travaux archéologiques menés sur les territoires ottomans, par des Ottomans. Il a très rapidement vu qu’il y avait un problème du point de vue des œuvres qui s’en allaient à l’étranger. C’est lui qui a fait instaurer la première législation concernant la protection du patrimoine historique et archéologique ottoman, et qui, dans la foulée, a fondé le Musée Impérial Archéologique à Istanbul, dans la 2e moitié du 19e siècle, devenu le Musée archéologique d’Istanbul. A ce titre, le musée archéologique d’Istanbul fut construit spécialement comme musée, et à l’instar du British Museum, il fait partie des grands musées européens d’archéologie du 19e siècle. J’ouvre une parenthèse pour préciser que, avant la construction de ce musée, l’église de Sainte Irène, à l’intérieur de l’enceinte du palais de Topkapi, jamais transformée en mosquée, fut d’abord utilisée comme dépôt d’arme, ensuite transformée en une sorte de musée d’histoire des armes, de l’armée, avec surtout l’exposition d’armes anciennes, avant de devenir progressivement un musée d’antiquité plus général. Ainsi l’historique des musées archéologiques dans l’empire ottoman remonte à loin. Pour revenir à Osman Hamdi Bey, lui-même fit un certain nombre de campagnes de fouilles, dont les plus connues sont celles de Sidon, dans le Liban actuel. Il y a découvert une nécropole royale, avec des sarcophages très spectaculaires, qui sont actuellement au Musée d’Istanbul, dont le plus connu est le sarcophage dit d’Alexandre ; citons encore le sarcophage des pleureuses. D’ailleurs, le Musée archéologique d’Istanbul a été construit autour de ces sarcophages, pour les exposer : l’agencement de la façade s’inspire même de très près du sarcophage des pleureuses ! Ainsi, il s’intéressait surtout au passé gréco-romain. Mais pour la petite histoire, son tombeau, qui se trouve à Eski Hisar, près d’Istanbul, est en forme d’une stèle funéraire seldjoukide – néo-seldjoukide, pour être exact. Ainsi, s’il n’a pas fouillé lui-même des antiquités islamiques, il était bien-sûr très intéressé par cela.

Mais revenons à ta question. Qu’est-ce qu’on trouve en Turquie… La Turquie actuelle, qui comporte l’Anatolie et la Thrace, est géographiquement un lieu de passage, d’Est en Ouest et inversement, ce qui fait que son histoire a connu de nombreuses populations et civilisations, qui traversèrent l’Anatolie, ou s’y installèrent. C’était donc un lieu de passage et de croisement, d’où la diversité de trouvailles archéologiques que l’on peut rencontrer en Anatolie. Cela remonte aux périodes les plus anciennes : le néolithique, avec un site qui vient d’être découvert assez récemment dans l’Anatolie du Sud-Est, qui correspond aussi à la Mésopotamie du Nord, dit Göbekli Tepe, où l’on trouve des traces des périodes les plus reculées du néolithique. En Anatolie centrale, le site le plus important est celui de Çatal Höyük, mondialement connu. Plus à l’Ouest, il y a la région des lacs, qui recèle aussi des sites néolithiques ; enfin, il y a le néolithique de la côté égéenne, que l’on ne connaissait pas bien avant ces dernières années, et que l’on commence à percevoir avec le développement des fouilles archéologiques dans cette zone. Par la suite, toutes les périodes historiques sont représentées, le bronze ancien, le bronze moyen, le bronze récent… Le bronze récent est intéressant, parce que c’est la période au cours de laquelle apparaît le premier Etat organisé ayant pour centre l’Anatolie : les Hittites, d’abord royaume avant de devenir un empire, qui s’étend jusqu’en Syrie, dans la 2e moitié du second millénaire avant Jésus-Christ. Il faut bien voir qu’à cette période, l’empire hittite, avec l’empire égyptien, sont les deux super-puissances de l’époque, ce qui provoqua de nombreux accrochages et luttes d’influence, notamment au sujet du Proche-Orient. Vient ensuite la période archaïque et classique hellénistique grecque, dite ionienne, très bien représentée en Anatolie. Après la mort d’Alexandre, des royaumes se sont créés sur son empire, notamment Pergame et les Attalides. Viennent encore les Perses, au 5e siècle, puisque l’Anatolie fait partie de l’empire perse, les Romains. On passe rapidement, pour arriver aux Byzantins, dont la capitale était Constantinople, l’actuelle Istanbul, ensuite les Seldjoukides de Roum, dont la capitale était Konya, située en Anatolie ; la période qui suit après est celle dite des beylicats, ces petits royaumes qui surgirent en Anatolie, dont un a réussi à continuer son existence, les Osmanli, qui fondèrent l’empire ottoman. Nous avons donc, en Anatolie, une richesse de civilisations extraordinaire, et surtout, peut-être le plus intéressant, un point de rencontre entre l’Est et l’Ouest, l’Orient et l’Occident, ce qui fait l’intérêt de ce territoire.

Quels sont les sites « célèbres » fouillés par des Français ?

Au 19e siècle, peut-être jusqu’au 20e, l’archéologie était un instrument diplomatique ; c’était un outil pour montrer l’influence et la puissance des Etats de l’époque. Cette bataille d’influence s’est tenue dans le Proche-Orient et en Turquie, un petit peu également en Grèce. Qui sont les puissances de l’époque : les Français, les Britanniques, les Allemands, un peu les Italiens, les Russes, bien qu’ils se spécialisèrent surtout dans le domaine byzantin. Ils ont d’ailleurs fondé un institut de recherches byzantines à Istanbul, qui n’existe plus : il a été fermé après la disparition de l’empire russe. Le 19e est donc la période des grandes découvertes, avec les sites de Babylone, de nombreuses découvertes en Egypte, etc. Mais l’Anatolie s’est retrouvée un petit peu à l’écart de ce courant, parce qu’il n’y a pas eu de découvertes de sites aussi prestigieux. Néanmoins, à l’honneur des Français, on peut citer la découverte de la capitale de l’empire hittite, Hattousha, par un explorateur français, Charles Texier ; après avoir fouillé quelques temps ce site, celui-ci est passé aux mains d’une équipe allemande, laquelle le fouille toujours. Comme site connu, nous avons encore l’exemple de Xanthos, sanctuaire dynastique de la période hellénique : ces deux sites, extraordinairement bien conservés, avec beaucoup de vestiges, sont toujours fouillés par des Français. Il y a eu un site important, Claros, qui est un des anciens centres d’oracle d’Apollon, actuellement continué par une équipe turque de l’université d’Izmir. Les Français ont également beaucoup œuvrés, pas seulement dans les fouilles de terrain, mais également dans le travail d’étude archéologique. Notamment, il y a eu de nombreux travaux menés par des Français dans le domaine de l’hittitologie, avec un des pères de cette science, Emmanuel Laroche, qui a beaucoup œuvré pour le développement de la connaissance de la langue hittite. Ce n’est pas lui qui l’a déchiffrée, mais il a néanmoins énormément apporté dans l’approfondissement de la connaissance de cette langue et de cette civilisation. Emmanuel Laroche fut, entre autre, l’un des anciens directeurs de l’IFEA (Institut Français d’Etudes Anatoliennes). Un autre ancien directeur de l’IFEA, en la personne de Louis Robert, fut un épigraphiste réputé, qui a beaucoup travaillé en Anatolie, et a déchiffré un grand nombre d’inscriptions qui s’y trouvaient. Donc, dans le domaine de l’archéologie en général, les Français étaient très bien représentés.

Comment expliquer alors les difficultés actuelles de l’archéologie française, qui souffre d’un certain désintérêt ?

Bien-sûr qu’il y a un phénomène financier, mais qui n’est pas seulement valable pour les Français. Actuellement, on subit la crise financière ; or, en tant de crise, la première chose que font les gouvernements, c’est de limiter les dépenses dans les domaines de la culture et de la recherche. L’archéologie en souffre. Mais encore une fois, ce n’est pas un phénomène propre aux Français. Or, les Allemands ou les Italiens se portent très bien en Turquie, alors qu’en ce qui concerne l’archéologie française, nous sommes dans une période assez catastrophique, pour être honnête. Il n’y a que deux missions de fouilles à proprement dites françaises actuellement en activité, et quelques prospections, alors que dans un passé récent, le nombre des missions en activité était beaucoup plus important. Qu’est-ce qui a causé cette diminution, ce recul ? Il y a une part de responsabilité qui tient dans les relations diplomatiques des deux pays, dont on ne peut pas dire qu’elles soient à leur sommet depuis un certain temps, et l’on ressent un peu les retombées de cette situation dans le domaine archéologique. La responsabilité ne peut être incombée seulement au côté turc ; le côté français, aussi, a un discours qui va dans le sens du développement de l’archéologie, et pourtant, on n’en ressent pas tellement les retombées, dans la pratique quotidienne. On ne peut pas dire non plus que l’archéologie française en Turquie souffre d’un manque de structure, puisqu’il existe l’Institut Français d’Etudes Anatoliennes, qui fut fondé dans les années trente comme un Institut Français Archéologique à Istanbul. Il était donc à l’origine tourné exclusivement vers l’archéologie, pour ensuite diversifier ses champs d’intérêts. Actuellement, l’IFEA possède toujours un pôle d’activité destiné à l’archéologie, et c’est un outil très utile pour les équipes françaises qui veulent travailler en Turquie ; c’est une antenne qui apporte une aide logistique, un point d’appui. Et pourtant, malgré cela, des pays ne bénéficiant pas d’institut de ce genre, l’Italie par exemple, se portent beaucoup mieux, puisque le nombre de missions italiennes approche la vingtaine, dont la plupart ont été créées dans les dix dernières années. On en revient à la cause première, l’argent : l’archéologie coûte cher. Pour fouiller un site, et surtout un site étendu, il faut avoir suffisamment d’argent pour obtenir des résultats. Or, la part du gâteau réservée pour la Turquie, dans l’ensemble des fouilles archéologiques françaises dans le monde, n’est pas très élevée. D’autant plus qu’en Turquie, le coût de la vie est relativement élevé, comparé à d’autres pays ; il faut donc un budget beaucoup plus important qu’en Syrie, par exemple, pour le même travail. Il faudrait prendre en compte ce genre de considérations, lors de la distribution des crédits aux missions. Et j’ai bien l’impression que ce n’est pas vraiment le cas. Du coup, les missions françaises en Turquie, bien souvent, n’arrivent pas à travailler aussi longtemps et aussi bien qu’il le faudrait. Bien-sûr, il y a le mécénat, de plus en plus développé ces derniers temps, par la force des choses. Mais contrairement aux pays anglo-saxons, il n’y a pas, en France, de tradition séculaire de sponsoring, de mécénat, c’est encore quelque chose qui est dans une phase de formation. Et il faut vraiment se batailler pour avoir un appui financier des sociétés en faveurs des missions.

Le mécénat serait donc une solution éventuelle pour palier aux difficultés de financements…Quelles seraient les implications, les conséquences pratiques d’un développement du mécénat privé dans l’archéologie française ?

Pour commencer, le terme français de mécénat n’est pas très adéquat. Les sociétés qui donnent un appui financier aux missions de fouilles ne font pas ça uniquement pour l’amour des arts ! C’est donnant-donnant. Il s’agirait plutôt d’une opération publicitaire pour la société mécène : si une société fournit une aide financière à une mission, elle veut avoir en contre-partie une aura particulière, voir sa renommée augmenter, trouver des occasions de faire parler d’elle, et cela ne peut fonctionner que pour les sites qui ont une certaine visibilité, qui ont des vestiges importants pour attirer l’attention des masses, etc. Or, l’importance scientifique n’est pas toujours proportionnée à la visibilité et à la renommée d’un site. Un site comme Ephèse, mondialement connu, et qui bénéficie d’un certain nombre de monuments qui attirent l’attention de centaines de milliers de touristes par année, trouverait très facilement une société pour financer des travaux sur le site. Mais si vous travaillez sur un site préhistorique, qui se trouve à l’intérieur des terres, et que les vestiges trouvés consistent en trois bouts de pierres qui traînent dans la poussière, d’aucune visibilité pour le touriste moyen, mais qui sont très importants pour la science, vous n’aurez pas forcément un mécène qui viendra à votre aide ! C’est là le grand danger du mécénat. D’autre part, une fois qu’un site est sponsorisé, il est souhaité que l’attention soit durable, donc chaque année, il faut faire des découvertes lisibles dans la presse ; or, le programme scientifique n’est pas axé sur ce type de considérations ou de découvertes spectaculaires. Vous pouvez avoir des découvertes spectaculaires, mais scientifiquement spectaculaires, et pas forcément susceptibles d’intéresser les masses de touristes ou les médias. Et donc, il y a le risque que les missions établissent leur programme non pas par rapport aux critères scientifiques, mais par rapport à des critères « commerciaux » ou publicitaires.

Parlons maintenant du site de Zeugma, rendu célèbre par la découverte de ses splendides mosaïques… L’équipe française fouillant sur le site a été mise de côté, remplacée par une équipe turque. Existe-t-il une politique de « nationalisation » du passé archéologique, historique, un peu à l’instar de l’Egypte ?

Contrairement à l’Egypte, les Turcs n’avaient pas de Turcs au moment où les sites que tu mentionnes se sont établis. Les Turcs sont arrivés après coup en Anatolie. Il y a bien une tendance, parmi d’autres, qui dit que tout ce qui est anatolien, c’est notre passé (turc), même si nous sommes arrivés plus tard. Mais de là à dire que tout doit être fouillé par les Turcs, il y a un grand pas. On peut dire que la politique du ministère de la culture a toujours été de donner une préférence aux équipes turques, ce qui est plus ou moins compréhensible. Néanmoins, dans le cas de Zeugma, découvert non pas par des Français, mais par un archéologue du nom de Kennedy, australien me semble-t-il, lequel a le premier identifié le site de Zeugma après des prospections, qui ont ensuite donné lieu à des fouilles archéologiques menées par le musée de Gaziantep – des fouilles d’urgence : c’est après coup que les Français se sont mis dans l’opération, et la découverte des fameuses mosaïques n’est arrivée que la dernière année. Il faut dire que Zeugma était fouillée dans le cadre d’une opération d’urgence, parce qu’il y avait un gros barrage en construction qui allait inonder une partie de la ville, et les mosaïques découvertes en 1999 se situaient toutes dans la partie inondable. Là, très vite, l’importance du site a augmenté terriblement. La personne qui, du côté français, était responsable des fouilles avait fait dès le début de la mission des demandes de sponsoring auprès des entreprises, notamment françaises, sans réponse ; mais en 1999, lorsqu’il y a eu la découverte des mosaïques, et surtout après un article dans le NewYork Times parlant de ces mosaïques, il y a eu tout d’un coup un excès de propositions de mécénat, alors qu’il était trop tard, il ne restait plus qu’une année avant l’inondation. D’ailleurs, en l’an 2000, les choses ont été assez catastrophiques, parce que la partie inondable du site a été fouillée en extension par plusieurs équipes, dont les Français, mais aussi la Oxford Rescue Unit, une équipe de professionnels britanniques, spécialisés dans l’archéologie d’urgence, ainsi qu’une équipe turque : tout ceci a été fait à la hâte, parce que la mise sous eau était imminente, alors qu’il aurait mieux valu la retarder, à mon avis. Pour en venir maintenant au passage du site des mains des Français à une équipe turque, déontologiquement parlant, cela ne s’est pas fait dans de bonnes conditions. D’autant que ce site est énorme, et qu’il y a largement assez de travail pour plusieurs équipes ; on aurait pu imaginer que les Turcs et les Français pussent travailler en même temps, dans deux zones différentes. Mais la responsable désignée comme chef de mission du côté turc a certes fait une offre de collaboration à la partie française, mais les conditions étaient telles qu’on a eu l’impression qu’il s’agissait d’une proposition faite pour être refusée, ce qui a été le cas. Du coup, actuellement, l’équipe française ne peut plus faire de fouilles sur le site, d’autant que la partie a été inondée ; elle a néanmoins la possibilité d’étudier les objets découverts au cours de ces fouilles, et qui sont actuellement conservés au musée de Gaziantep.

Comment est géré ce passé archéologique, découvert suite aux diverses campagnes de fouilles. Certains sites, tels que Troie, ont donné lieu à une mise en scène pseudo-historique. En dehors de ces sites exceptionnels, qu’elle est la politique générale de gestion du patrimoine archéologique ?

Jusqu’à il y a dizaine d’années, le ministère de la culture, qui délivre les autorisations aux missions turques comme étrangères, ne faisaient pas cas des travaux de restauration et de conservation des objets mis à jour au cours des fouilles. Mais depuis une bonne dizaine d’année, en donnant l’autorisation, elle précise bien les conditions : à savoir s’occuper de la conservation de ces découvertes, de leur préservation, voire de leur mise en valeur – ce qui est une très bonne chose. Mais, d’autres parts, il faut signaler aussi que ceci apporte un surcoût aux missions archéologiques, parce que la préservation, la restauration sont des choses très coûteuses. En ce qui concerne les missions étrangères, ce sont elles qui sont supposées financer entièrement ces travaux de restauration et de mise en valeur. Mais tout ceci est régi par des règlements, qui sont valables pour l’ensemble des missions, et pas seulement étrangères, sous la surveillance des commissions de préservation du patrimoine naturel et culturel, qui sont des commissions régionales. Les projets de restauration ou de mise en valeur doivent être validés par ces commissions. Par exemple, disons que tu veuilles faire un toit au-dessus des objets pour les protéger de la pluie, il faut qu’un architecte établisse un projet, qui devra être accepté par la commission, avant d’être exécuté. Ce n’est pas toujours très facile, bureaucratiquement – la France et la Turquie sont deux pays qui, sur le point de la bureaucratie, se valent largement ! Toujours est-il qu’il y a une volonté de préservation et de conservation des vestiges. Néanmoins, je ne sais pas quel est le moteur général : est-ce que c’est une volonté de préserver son passé, ou plutôt un intérêt touristique… Il y a sans doute une part des deux. L’appropriation du passé anatolien par les Turcs a donné lieu à certains dérapages, dans les années 30, lorsque certains ont prétendu que les Hittites étaient Turcs, même les Sumériens étaient Turcs, et après tout le monde était Turc… Mais ce genre d’idéologie était très monnaie courante dans les années 30, et reste daté historiquement – et politiquement. Actuellement, il n’y a rien de tel, sans pour autant qu’il n’y ait de désintérêt disant « c’est pas nous, donc on s’en fiche ». Non, rien de tel. Mais si on s’en occupe, c’est autant parce que c’est un patrimoine culturel, que touristique…

Télécharger au format PDFTélécharger le texte de l'article au format PDF

SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0