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Massoud Barzani séjourne en Turquie dans un contexte difficile

vendredi 4 juin 2010, par Jean Marcou

Le président de la région kurde d’Irak du nord, Massoud Barzani, est depuis hier en Turquie. C’est la première fois que le leader kurde irakien y revient depuis 2004. Entretemps, après s’être fortement détériorées, les relations d’Ankara avec l’Irak du nord se sont améliorées de façon spectaculaire. Elles se sont notamment institutionnalisées au travers d’une structure permanente, qui se réunit régulièrement, et elles ont abouti à l’ouverture d’un consulat turc à Erbil (la capitale de la région kurde d’Irak du nord) où le ministre turc des affaires étrangères, Ahmet Davutoğlu, s’est rendu en octobre dernier (cf. notre édition du 6 novembre 2010).

Tout ne va pourtant pas pour le mieux entre la Turquie et les Kurdes d’Irak du nord. L’ouverture kurde lancée par Recep Tayyip Erdoğan s’est enlisée et le DTP a été dissous. Certes, on a pu observer que, dans un premier temps, Massoud Barzani a plutôt ménagé l’AKP. Il avait notamment exprimé sa colère contre la décision de la Cour constitutionnelle qui avait mis un terme à l’existence du DTP, mais en continuant à saluer le processus politique engagé par le gouvernement turc. Pourtant, depuis le début de l’année, les arrestations de militants kurdes se sont multipliées en Turquie, l’ex-leader du DTP, Ahmet Türk, a été agressé physiquement, de nombreux manifestants mineurs sont toujours emprisonnés, et des accrochages ont eu lieu régulièrement entre l’armée et le PKK dans le sud-est, faisant ces dernières semaines, notamment, plusieurs dizaines de morts. En outre, sur le plan politique, alors que le processus d’ouverture semble gelé, aucune mesure n’a concerné directement les Kurdes dans le projet de réforme constitutionnelle adopté récemment par le Parlement, et le gouvernement n’a d’ailleurs pas pu compter sur le soutien du BDP, à cette occasion.

De surcroît, au-delà de ce climat d’ensemble lourd, le contexte le plus récent de la visite de Massoud Barzani a rendu celle-ci encore plus difficile. En effet, dans la nuit de dimanche à lundi, 7 soldats turcs ont été tués dans une attaque conduite contre une base navale près d’Iskenderun (sud-est du pays) par des rebelles du PKK, peu après qu’Abdullah Öcalan, le leader emprisonné de l’organisation rebelle, avait fait savoir qu’il renonçait à essayer de dialoguer avec les autorités turques. Certes, il avait aussi précisé que cette annonce n’était pas un appel à la reprise de la lutte armée. Mais la presse turque n’a pas hésité à établir un rapport de cause, en mettant en outre en relief la concomitance de l’arraisonnement de la flottille « Free Palestine » et l’attaque contre la base d’Iskenderun. Le gouvernement turc accuse, en effet, les autorités kurdes d’Irak du Nord d’avoir des relations suivies avec Tel-Aviv, et pensent que le PKK bénéficie d’un soutien militaire des services secrets israéliens. De là à voir la main du Mossad dans l’attentat d’Iskenderun, au moment même où les commandos de marine israéliens se lançaient à l’assaut du « Mavi Marmara », il n’y avait qu’un pas que beaucoup d’éditorialistes et de leaders politiques ont franchi rapidement. Mardi, plusieurs quotidiens titraient à la fois sur l’arraisonnement du navire turc et l’attaque de la base navale.

Dans un tel contexte, les autorités turques attendent plus que jamais du leader kurde irakien qu’il s’engage à ne plus soutenir le PKK, mais l’on ne connaît pas pour l’instant le contenu et les résultats des premiers entretiens qui ont eu lieu.

JM

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Sources

Source : Ovipot, le 03.06.10

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