La Cour européenne des droits de l’homme somme la Turquie de mettre en place « d’ici trois mois » un mécanisme de réparation pour les chypriotes grecs spoliés de leurs biens par l’intervention de ses troupes dans la partie nord de l’île en 1974.
Les juges de Strasbourg formulent cette injonction dans un arrêt favorable à une chypriote grecque de 45 ans, Myra Xenides-Arestis, qui avait dû quitter la ville de Famagouste, où elle possédait plusieurs propriétés dont sa résidence familiale.
Dans un arrêt rendu par six voix contre une (celle du juge turc), la juridiction du Conseil de l’Europe affirme qu’elle a été victime d’une violation du droit au respect de sa vie privée et familiale et d’une violation de son droit de propriété.
A l’unanimité cette fois, la cour déclare que la Turquie « doit introduire un mécanisme de réparation qui assure la protection effective (de ces droits) vis-à-vis du présent requérant mais aussi de toutes les requêtes similaires actuellement pendantes devant la cour ».
« Un tel mécanisme devrait être en place dans les trois mois suivant l’arrêt et les réparations devraient être effectives dans les trois mois suivant », ajoutent les juges.
Environ 1.400 requêtes similaires sont pendantes devant la Cour européenne des droits de l’homme. L’arrêt n’est cependant pas définitif. La Turquie dispose de trois mois pour demander que l’affaire soit réexaminée par la grande chambre de la cour.
C’est la quatrième fois que les juges strasbourgeois tranchent en faveur de chypriotes grecs spoliés de leurs biens par l’intervention militaire turque depuis un arrêt rendu le 18 décembre 1996 en faveur de Titina Loizidou.
La Turquie n’a consenti qu’en décembre 2003 à verser à cette dernière la somme de 1,12 million d’euros. Le gouvernement turc refusait de payer en estimant que la loi sur l’indemnisation des propriétaires de biens immobiliers promulguée le 30 juin 2003 en République turque de Chypre du Nord (RTCN, qui n’est reconnue que par Ankara) était un remède effectif pour les victimes.
La Cour européenne des droits de l’homme a battu cet argument en brèche lorsqu’elle s’est prononcée sur la recevabilité de la requête de Myra Xenides-Arestis.
Dans une décision du 2 septembre 2004 rendue publique en avril 2005, la Cour note que cette loi ne concerne que la compensation du dommage matériel et ne prévoit ni l’indemnisation du dommage moral, ni l’éventuelle restitution du bien spolié.
Le nouvel arrêt de la cour intervient alors que le parlement de Chypre nord a ratifié lundi une réforme de la loi sur la propriété qui autorise désormais les chypriotes grecs à demander la restitution de leurs biens. La Cour européenne des droits de l’homme ne s’est pas encore exprimée sur la conformité de cette réforme avec ses propres critères.