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Est-ce les idées qui sont importantes ou ceux qui les disent ?

mercredi 19 août 2009, par Traduction Paul Dubois, Zülfü Livanelli


Imaginez-vous que vous répondiez aux questions d’un étranger qui se trouve soudainement à Istanbul et qui ne connait rien concernant ce pays.

Et imaginez-vous que se déroule entre vous la conversation suivante :.

L’étranger : Comment se déroule la vie politique en Turquie ?

Vous : Il y a la démocratie, nous avons des partis politiques à l’Assemblée Nationale.

L’étranger : Quelles sont les tendances de ces partis politiques ?

Vous : Il y a des partis de gauche et de droite, comme en Europe.

L’étranger : Et quelles sont les idées des partis de droite sur les droits de l’homme, les droits culturels, l’Union Européenne ?

Vous : Le parti de droite essaye de développer une solution sur la question kurde sur les bases universelles des droits de l’homme. Ils demandent l’arrêt de l’effusion de sang.

L’étranger : Et le parti de gauche ?

Vous : Il a un discours plus nationaliste et a peur que cette ouverture divise la Turquie.

L’étranger : Et le parti nationaliste ?

Vous : Ils disent la même chose.

L’étranger : Et concernant l‘Union Européenne ?

Vous : La situation est à peu près pareille à ce sujet. Le parti à tendance religieuse et de droite défend l’adhésion à l’U.E. et les partis de gauche et nationalistes ont un regard sceptique.

L’étranger : Et sur les minorités ?

Vous : Le premier ministre de droite affirme que « c‘est fasciste de virer les minorités de Turquie ». Il veut la réouverture des Séminaires (orthodoxes fermés depuis les années 50 suite à la promulgation d’une loi) et de la frontière avec l’Arménie. Les partis de gauche et nationalistes condamnent lourdement les démarches entreprises.

De plus, le gouvernement affirme qu’il n’y a pas lieu d’être raciste sur les noms des lieux en Turquie (NDLR : plusieurs noms de lieux ont été turquisés) et s’adresse à l’opposition en leur demandant : « Etes-vous plus nationalistes qu’Alpaslan (Sultan seldjoukide qui a gagné la bataille de Malazgirt en 1071, date du début de l’installation des Turcs en Anatolie NDLR), Orhan Gazi (le père du fondateur de l’Empire Ottoman NDLR) ou Mustafa Kemal (Atatürk), qui ont conservé les noms arméniens, grecs, latins des villes ? ».

***

Quelle pourrait être la réaction de l’étranger suite à cette conversation ?

Ne dirait-il pas : « Ne le prenez pas mal mais j’ai comme une impression que vous n’arrivez plus à distinguer votre droite de votre gauche ? Vous déclarez comme étant de droite ceux qui mettent en avant les valeurs défendues par la gauche telles que le modernisme, la démocratie, l’U.E., les droits de l’homme, les minorités, les droits culturels ; et de gauche ceux qui mettent en avant les reflexes nationalistes. Il n’existe nulle part au monde une telle bizarrerie. Si vous revoyiez votre terminologie d’abord ? »

***

Aujourd’hui la Turquie essaye de répondre à la question : « Est-ce les idées qui sont importantes ou ceux qui les disent ? ».

Qu’allez-vous faire quand un jour vos opposants se réclameront des idées que vous défendez depuis des années ?

Allez-vous renoncer à vos valeurs fondamentales ? Ou allez-vous approuver les dires de vos opposants ?

Faut-il s’opposer à ceux qui nous gouvernent actuellement, pour avoir repris les notions défendues envers et malgré tout par la vraie gauche dans ce pays depuis des années, ou faut-il encourager la posture de ceux qui formulent ces notions ?

Telle est la question…

Quelle est la condition requise pour être un être humain droit ?

Encourager les ouvertures justes sans se soucier de ceux qui les entreprennent ou fermer les yeux aux tribulations des anciens compagnons qui se coupent progressivement du monde, en s’écartant de l’idéal révolutionnaire et « universaliste » de Mustafa Kemal et qui s’enferment dans un conservatisme curieux, sous prétexte qu’ils sont des nôtres ?

L’AKP mène une politique structurelle que nous combattons et à laquelle nous continuerons à nous opposer mais ceci implique-t-il une opposition aveugle à toutes ses positions ?

Le combat dans un monde noir et blanc est chose aisée mais n’est-il pas difficile pour les générations à venir de prendre position dans cette situation si confuse ?

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Voir en ligne : http://haber.gazetevatan.com/haberd...

Sources

Source : Vatan Gazetesi, le 15 Août 2009.

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