Il s’agit d’une affaire absurde qui révèle bien des archaïsmes de la société politique turque, sinon d’une administration déconnectée de la réalité. Le gouvernement , responsable d’une mise à l’écart culturelle d’une partie de la population – tout ce qui n’est pas sunnite et conservateur –, n’est
pas étranger non plus au sort de Sevil Sevimli. Cette étudiante franco-turque, âgée de dix-neuf ans, encourt trente-deux ans de prison pour des liens supposés avec une organisation d’extrême gauche. Son procès a été reporté au 19 novembre, dans la ville de Bursa, connue pour abriter une
grande usine Renault. Cette jeune femme est arrivée en début d’année de Lyon, dans une petite ville appelée Eskişehir, pour étudier dans le cadre d’un échange Erasmus. Avec l’idée aussi de connaître un peu mieux son pays d’origine. Après trois mois passés en prison, elle vient d’être remise
en liberté sous contrôle judiciaire. Elle ne peut toujours pas rentrer en France.
Pour quel crime ? Celui d’avoir participé au rassemblement du 1er mai dernier à Istanbul – manifestation pourtant devenue légale – et d’avoir assisté, ainsi que 300 000 autres spectateurs, à un concert de Yorum, un groupe de musique anti-coup d’État, genre Trust avec son tube Antisocial. Rien de grave, surtout rien d’illégal. Maigre dossier. Sauf que la justice en a décidé autrement et, à la consternation de tous les observateurs, continue de l’accuser de diriger une organisation terroriste appelée Front révolutionnaire de libération du peuple. Organisation d’extrême gauche bien réelle, dont elle n’avait jamais entendu parler avant d’arriver en Turquie. Il semble aussi qu’elle ait posé une affiche sur un mur demandant la gratuité de l’enseignement. Le débat est très vif en ce moment face à une privatisation de l’enseignement supérieur.
En France, une pétition lancée par sa mère a déjà recueilli plus de cent mille
signatures. Un cri du cœur. Son cas est emblématique, il montre l’inadaptation de la loi « antiterroriste » de 2006 pour lutter contre le PKK. Il montre aussi que la loi ne peut pas tout et doit être appliquée avec discernement. Enfin, d’origine alévie – une minorité très attachée au kémalisme et à la nation de laïcité –, la jeune fille incarne parfaitement ce qui déplaît au gouvernement actuel…
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